6.
Au bout de cent dix ans dont le cercle renferme
De l’âge des humains presque le plus long terme,
Souvenez-vous Romains, de présenter aux dieux
Des sacrifices saints qui plaisent à leurs yeux.
Souvenez-vous surtout, plus que d’aucune chose,
Dans le champ que le Tibre de son eau vive arrose,
D’élever aux grands dieux de superbes autels,
Aux grands dieux honorés du titre d’immortels.
Lorsque dessous les eaux le brillant œil du monde
Aura comme éclipsé sa lumière féconde,
Des chèvres, des agneaux offerts dévotement
Aux parques qui sont nés de l’humide élément.
Présentez à Lucine un juste sacrifice,
Qui la rende à vos vœux favorable et propice.
Immolez un porc noir, avec de chastes mains,
A la terre, des dieux la mère et des humains;
Quand le jour aura pris sa nouvelle naissance,
Adorez de Jupin la céleste puissance,
De Junon, de Phébus et des divinités,
Dont la blanche victime attire lei bontés.
Que les jeunes garçons et que les jeunes filles,
Ces tendres rejetons, ces sources des familles,
Chantent des airs charmants et des concerts divers,
En l’honneur de ces dieux qui règlent l’univers.
Mais qu’ils chantent à part, sans qu’on puisse confondre,
La fille et le garçon qui veulent se répondre;
Que nul n’y soit trouvé de ceux à qui le sort
De leurs parents perdus a fait pleurer sa mort.
Que celle qui jouit d’un heureux hyménée,
A l’autel de Junon humblement prosternée,
Attire de ses vœux, par l’ardente ferveur,
Sur les sexes divers la divine faveur.
Que chacun à l’autel apporte les prémices,
Qui du céleste esprit font les saintes délices.
Ainsi des dieux contents tu gagneras le cœur,
Et des peuples voisins tu seras le vainqueur.