Traduction
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Contre les Académiciens
29.
Reste à parler de la dialectique qu'assurément le sage connaît bien, car la fausseté ne peut être l'objet de la connaissance. S'il ne la connaît pas, elle n'appartient donc pas à la sagesse, puisque sans elle il a pu être sage, et nous cherchions inutilement si elle est vraie et si elle peut être connue.
Peut-être ici quelqu'un va me dire : imbécille que tu es, tu as coutume de montrer ce que tu sais. N'as-tu rien pu savoir en dialectique? J'en sais plus là-dessus qu'en aucune autre partie de la philosophie : car d'abord, elle m'a appris que toutes les propositions que j'ai rapportées plus haut sont vraies. Ensuite, c'est par elle que j'ai connu beaucoup d'autres choses véritables. Pourrez-vous en compter le nombre? S'il n'y a dans le monde que quatre éléments, il n'y en a pas cinq; s'il n'y a qu'un soleil, il n'y en a pas deux; une âme ne peut pas mourir et être immortelle; l'homme ne peut être tout ensemble heureux et misérable; pendant que le soleil luit ici, il ne fait pas nuit; ou nous dormons maintenant, ou nous sommes éveillés; ou ce qu'on croit voir est un corps ou ce n'est pas un corps. C'est par la dialectique que j'ai appris la vérité de ces propositions et d'une infinité d'autres qu'il serait trop long de rapporter ici. C'est par elle que je sais qu'elles sont vraies en elles-mêmes, de quelque manière que se comportent nos sens. Elle m'a aussi enseigné que si l'on admet une proposition dans les raisonnements que j'ai cités, les autres suivent nécessairement; que celles que j'ai rapportées sous forme d'opposition ou de dilemme, sont de telle nature, que lorsqu'on nie un ou plusieurs membres, celui qui reste est prouvé par la négation même des autres. Elle m'a encore fait connaître que lorsqu'on est d'accord sur la chose dont on parle, on ne doit pas disputer sur les paroles; que si quelqu'un le fait par ignorance, il faut l'instruire; si c'est par malice, il faut le laisser là; si c'est par incapacité, il faut lui conseiller de s'appliquer à quelqu'autre chose plutôt que de perdre son temps à se donner une peine inutile, et s'il ne se soumet pas, il ne faut plus s'occuper de lui. A l'égard des raisonnements captieux ou trompeurs le précepte est court. Si on les infère de ce qui aura été concédé mal à propos, il faut reprendre ce qu'on avait ainsi accordé. Si le vrai et le faux se trouvent mêlés dans une même conséquence, il en faut prendre ce que l'on comprend et abandonner ce qui ne peut être expliqué. S'il y a certaines choses dont l'homme ne puisse absolument connaître la raison ni la cause, il ne faut pas en vouloir acquérir la connaissance.
Voilà ce que j'ai appris de la dialectique et d'autres choses encore dont il n'est pas nécessaire de faire ici le détail; car je ne dois pas être ingrat. Ainsi, ou ce sage la néglige, ou bien certainement si la dialectique est la connaissance même de la vérité, il la connaît assez pour mépriser et laisser impitoyablement expirer dans le silence cet adage menteur : si c'est vrai, c'est faux ; si c'est faux, c'est vrai. Je crois qu'en voilà assez sur la connaissance; car lorsque j'aurai commencé à parler de l'assentiment, toute la question s'y trouvera de nouveau traitée.
Edition
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Contra Academicos (PL)
29.
Restat dialectica, quam certe sapiens bene novit, nec falsum scire quisquam potest. Si vero eam nescit, non pertinet ad sapientiam ejus cognitio, sine qua esse sapiens potuit; et superfluo utrum vera sit, possitve percipi, quaerimus. Hic fortasse aliquis mihi dicat: Soles prodere tu stulte, quid noveris: an de dialectica nihil scire potuisti? Ego vero plura quam de quavis parte philosophiae. Nam primo omnes illas propositiones, quibus supra usus sum, veras esse ista me docuit. Deinde per istam novi alia multa vera. Sed quam multa sint, numerate, si potestis. Si quatuor in mundo elementa sunt, non sunt quinque. Si sol unus est, non sunt duo. Non potest una anima et mori et esse immortalis. Non potest homo simul et beatus, et miser esse. Non hic et sol lucet, et nox est. Aut vigilamus nunc, aut dormimus. Aut corpus est, quod mihi videre videor, aut non est corpus. Haec et alia multa, quae commemorare longissimum est, per istam didici vera esse, quoquo modo sese habeant sensus nostri, in se ipsa vera. Docuit me, si cujus eorum quae per connexionem modo proposui pars antecedens assumpta fuerit, trahere necessario id quod annexum est. Ea vero quae per repugnantiam vel disjunctionem a me sunt enuntiata, hanc habere naturam, ut cum auferuntur caetera, sive unum, sive plura sint, restet aliquid quod eorum ablatione firmetur. Docuit etiam me, cum de re constat, propter quam verba dicuntur, de verbis non debere contendi: et quisquis id faciat, si imperitia faciat, docendum esse; si malitia, deserendum: si doceri non potest, monendum ut aliquid aliud potius agat, quam tempus in superfluis operamque consumat; si non obtemperat, negligendum. De captiosis autem atque fallacibus ratiunculis breve praeceptum est: si male concedendo inferuntur, ad ea quae concessa sunt esse redeundum. Si verum falsumque in una conclusione confligunt, accipiendum inde quod intelligitur, quod explicari non potest relinquendum. Si autem modus in aliquibus rebus latet penitus hominem, scientiam ejus non esse quaerendam. Haec quidem habeo a dialectica, et alia multa quae commemorare non est necesse. Neque enim debeo ingratus existere. Verum ille sapiens aut haec negligit, aut si profecto dialectica ipsa scientia veritatis est, sic illam novit ut istorum mendacissimam calumniam: Si verum est, falsum est; si falsum est, verum est: contemnendo, et non miserando fame enecet. Haec de perceptione satis esse propterea puto, quia de assentiendo cum dicere coepero, tota ibi rursum causa versabitur.