Edition
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De ordine (PL)
7.
Quam sententiam ejus cum admiratione considerans, recordatus sum idipsum aliquando me breviter illo audiente dixisse. Tum arridens: Gratias age, inquam, Licenti, huic servo tuo, qui tibi nisi aliquid de peculio suo ministraret, nunc fortasse quod promeres non haberes. Nam si ad eam partem memoria pertinet, quae se velut famulam bonae menti regendam concedit, ipsa nunc adjutus es, mihi crede, ut hoc diceres. Ergo antequam ad illum ordinem redeam, nonne tibi videtur vel propter talia, id est, propter honestas ac necessarias disciplinas, memoria opus esse sapienti? Quid, inquit, memoria opus est, cum omnes suas res praesentes habeat ac teneat? Non enim vel in ipso sensu, ad id quod ante oculos nostros est, in auxilium nobis vocamus memoriam. Sapienti ergo ante illos interiores intellectus oculos habenti omnia, id est, Deum ipsum fixe immobiliterque intuenti, cum quo sunt omnia quae intellectus videt ac possidet, quid opus est, quaeso, memoria? Mihi autem ut opus esset ad haec quae abs te audieram retinenda, nondum sum illius famuli dominus; sed ei modo servio, modo pugno ut non serviam, et quasi me audeo asserere in libertatem meam. Et si forte aliquando impero, atque obtemperat mihi, facitque saepe putare quod vicerim, in aliis rursus rebus ita sese erigit, ut ejus sub pedibus miser jaceam. Quamobrem, quando de sapiente quaerimus, me nolo nomines. Nec me, inquam. Sed tamen numquidnam sapiens iste suos potest deserere, aut ullo pacto, cum hoc corpus agit, in quo istum famulum sua lege devinctum tenet, relinquet officium beneficia tribuendi quibus potest, et maxime quod ab eo vehementissime flagitatur, sapientiam ipsam docendi? Quod cum facit, ut congrue doceat, minusque ineptus sit, praeparat saepe aliquid, quod ex dispositione eloquatur ac disputet, quod nisi memoriae commendaverit, pereat necesse est. Ergo aut officia benevolentiae negabis esse sapientis, aut confiteberis res aliquas sapientis memoria custodiri: an fortasse aliquid suarum rerum non propter se quidem, sed propter suos sibi tamen necessarium commendat servandum illi famulo, ut ille tanquam sobrius, et ex optima domini disciplina, non quidem custodiat, nisi quod propter stultos ad sapientiam perducendos, sed quod ei tamen ille custodiendum imperarit? Nec omnino huic, inquit, commendari quidquam arbitror a sapiente; siquidem ille semper Deo infixus est, sive tacitus, sive cum hominibus loquens: sed ille servus jam bene institutus diligenter servat quod interdum disputanti domino suggerat, et ei tanquam justissimo gratum faciat officium suum, sub cujus se videt potestate vivere. Et hoc facit non quasi ratiocinando, sed summa illa lege summoque ordine praescribente. Nihil, inquam, nunc resisto rationibus tuis, ut quod suscepimus potius peragatur. De isto vero diligenter quemadmodum sese habeat (non enim parva res est, aut tam parvo sermone contenta) videbimus alias, cum Deus ipse opportunitatem ordine dederit.
Traduction
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De l'ordre
7.
Je considérais avec admiration cette pensée, et je me souvins qu'un jour je l'avais émise rapidement devant lui. Souriant alors Licentius, lui dis-je, remercie ton esclave, s'il ne te donnait de son pécule, tu n'aurais peut-être rien à présenter. Car si la mémoire est dans cette partie de l'âme, qui s'abandonne comme une esclave à la direction d'un jugement sain, c'est elle, crois-moi, qui t'a aidé à parler ainsi. Avant donc d'en revenir à l'ordre qui est notre sujet, ne vous paraît-il pas que, pour de semblables motifs, c'est-à-dire pour des études honnêtes et nécessaires, le sage ait besoin de mémoire?-Comment, reprit-il, cette mémoire lui serait-elle nécessaire, puisqu'il a présent, sous la main, tout ce qui lui appartient? Car ce n'est pas même pour les objets sensibles, pour ce qui est devant nos yeux, que nous demandons aide à la mémoire; or, le sage a tout présent aux yeux intérieurs de son intelligence, c'est-à-dire qu'il contemple d'un regard fixe et immobile Dieu lui-même, Dieu qui renferme en lui tout ce qui voit et possède l'intelligence. Je vous le demande donc, a-t-il besoin de mémoire? Pour moi, si j'en ai eu besoin pour retenir ce que j'ai recueilli de toi, c'est que je ne suis pas encore maître de cet esclave. Tantôt j'en suis dominé, tantôt je me débats pour m'affranchir, et je m'anime en quelque sorte à revendiquer ma liberté. Si quelquefois je commande, si elle m'obéit, si elle me fait croire souvent à une victoire complète, bientôt en d'autres occasions, elle se redresse contre moi et me foule misérablement aux pieds. Aussi quand nous parlons du sage, ne me nomme pas, je t'en prie. — Ni moi non plus, répondis-je.
Le sage toutefois pourra-t-il jamais abandonner les siens? Pourra-t-il, en conduisant ce corps où il retient cette esclave sous sa loi, oublier de quelque manière, l'obligation de faire du bien à qui il peut, et surtout d'enseigner la sagesse, ce qui lui est demandé avec instance? Pour cela, pour enseigner convenablement, et être moins inhabile, il prépare souvent ce qu'il doit dire, afin de l'exposer avec ordre, et cela lui échappera nécessairement, s'il ne l'a confié à sa mémoire. Il faut donc ou nier que la bienfaisance soit un devoir du sage, ou avouer que le sage doit confier quelque chose à sa mémoire. Tu diras peut-être qu'il confie à la garde de ce serviteur, cette part de ses richesses dont il a besoin non pour lui-même, mais pour les siens, et qu'en veillant avec fidélité et d'après la manière dont l'a formé le maître, sur ce que celui-ci a commis à ses soins, l'esclave n'agit que dans l'intérêt des insensés qu'on veut rendre sages? — Je crois, reprit-il, que le sage ne lui donne absolument rien à garder, car le sage est toujours fixé en Dieu, qu'il observe le silence ou converse avec les hommes. Mais ce serviteur bien dressé garde avec soin ce qu'il doit présenter à son maître pendant la conversation; et comme ce maître est très-juste, comme il se voit sous son empire, il prend à tâche de mériter ses bonnes grâces dans l'accomplissement de son devoir. Il agit ainsi non par raisonnement, mais par une loi supérieure, et par l'ordre suprême. — Maintenant je ne résiste plus à tes raisons, lui dis-je ; achevons plutôt ce que nous avons commencé. Quant à cette dernière question, comme elle n'est pas sans importance, et qu'on ne peut la traiter si brièvement, nous en examinerons avec soin la nature un autre jour, lorsque, d'après l'ordre de Dieu lui-même, s'en présentera l'occasion.