12.
Ceux qui ne sont pas au courant de leurs habitudes croient que leurs violences contre, eux-mêmes datent du moment où des lois établies pour l'unité, délivrent des peuples entiers de leur brutale domination. Ceux qui les connaissent mieux et savent ce qu'ils faisaient avant ces lois, ne s'étonnent pas de les voir se donner la mort, mais se rappellent leurs coutumes : surtout l'époque où le culte des idoles subsistait encore, ils allaient en grandes troupes au milieu des fêtes païennes, non point pour renverser les idoles, mais pour se faire tuer par leurs adorateurs. S'ils s'étaient présentés là avec un pouvoir légitime d'empêcher le culte païen, ils auraient eu, en cas de mort, une apparence quelconque de martyre; mais ils venaient seulement pour se faire tuer sans toucher aux idoles : les plus vigoureux d'entre les jeunes idolâtres avaient coutume de vouer à leurs dieux tous ceux qu'ils pourraient tuer, Quelques-uns de ces furieux se jetaient même sur des voyageurs armés, les menaçant de les tuer si ces voyageurs ne les tuaient pas. Parfois encore ils demandaient violemment à des juges qui passaient qu'ils les livrassent aux bourreaux; on rapporte qu'un de ces juges, ne voulant ni les faire mourir ni s'exposer à leur rage, ordonna qu'on les liât comme pour donner satisfaction à leur frénésie, et puis les renvoya. Et même aussi c'était pour eux un jeu de tous les jours de se jeter dans des précipices, dans l'eau et le feu pour y trouver la mort. Se précipiter sur des rocs, dans des flammes ou dans des gouffres, voilà les trois genres de mort que le démon leur avait enseignés pour (485) leur propre compte, lorsqu'ils ne rencontraient personne qu'ils pussent contraindre par menaces à les frapper du glaive. Et quel autre aurait pu les leur apprendre, si ce n'est celui qui se servit même de la loi pour persuader à notre Sauveur de se précipiter du haut du pinacle du temple 1? Ils n'auraient pas cédé à cette suggestion s'ils avaient porté dans leur coeur le Christ notre Maître. Mais parce qu'ils ont plutôt donné entrée au démon dans leur âme, ils périssent comme ce troupeau, de pourceaux précipité du haut d'une montagne dans la mer 2: lorsqu'on les arrache à ce délire homicide et qu'on les recueille pieusement dans le sein maternel de l'Eglise, ils sont délivrés comme le fut le démoniaque que son père présenta au Sauveur pour être guéri, et qui tombait tantôt dans le feu et tantôt dans l'eau 3.