15.
Avant l'établissement de ces lois par les empereurs catholiques, la doctrine de la paix et de l'unité du Christ se répandait peu à peu , et l'on y passait comme on l'entendait, comme on le voulait, et comme on pouvait, du parti même de Donat ; et toutefois ces bandes d'hommes perdus ne manquaient pas de troubler parmi eux et pour divers motifs le repos des innocents. Quel maître n'était forcé de craindre son serviteur, quand celui-ci se mettait sous la protection de ces forcenés ? Qui eût osé parler trop haut à un pillard, contraindre un voleur ou un débiteur qui les auraient appelés à leur secours? De méchants esclaves, qui voulaient devenir libres, menaçaient leurs maîtres du bâton , de l'incendie et de mort, (486) et obtenaient la destruction des titres de leur servitude. On arrachait aux créanciers leurs titres pour les rendre aux débiteurs. Quiconque méprisait les dures paroles de ces furieux était forcé par des coups plus cruels à faire ce qu'ils ordonnaient. Des innocents qui avaient eu le malheur de leur déplaire voyaient leurs maisons jetées bas ou dévorées par les flammes. Des pères de famille de bonne naissance et de noble éducation ont été emportés à peine vivants après les violences exercées sur eux; ou bien attachés à la meule ils ont été forcés, à coups de fouet, de la tourner comme de vils animaux. De quel secours ont jamais été contre eux les lois et les puissances civiles? Quel officier a jamais soufflé en leur présence? Quel collecteur a jamais exigé d'eux ce qu'ils refusaient de donner? Qui jamais essaya de venger ceux qui étaient tombés sous leurs coups ? Ils ont trouvé leur châtiment dans leur propre fureur, tantôt en demandant aux passants qu'ils les tuassent sous peine de les tuer eux-mêmes, tantôt en se jetant dans des précipices, dans l'eau ou le feu : ils s'arrachaient ainsi leurs âmes malheureuses par des supplices volontaires.