3.
Il y a un autre mal, un grand mal, un mal fort détestable et horrible dans l'amour excessif de cette vie : plusieurs, en voulant vivre un peu plus longtemps, offensent gravement Dieu, en qui est la source rte la vie, et tandis qu'ils repoussent la pensée d'une fin inévitable, ils s'excluent du lieu où nous attend une vie sans fin. D'ailleurs une vie misérable, quand elle pourrait toujours durer, ne saurait être comparée à une vie heureuse, même très-courte; et cependant le goût d'une vie misérable et fugitive fait perdre celle qui est heureuse et éternelle, lorsqu'on veut, dans celle qu'on aime autrement qu'on ne devrait, ce qu'on perd dans l'autre; car on n'aime pas la misère de la vie présente, puisqu'on veut être heureux; on n'en aime pas la brièveté, puisqu'on ne veut pas arriver à son terme; mais on l'aime parce qu'elle est la vie, et de telle sorte que, malgré sa misère et sa brièveté, on perd souvent, à cause d'elle, celle qui est heureuse et éternelle.