11.
« Je t’ai exaucé dans le secret de la tempête», non de l’ouragan des mers, mais de la tempête du coeur. « Je t’ai exaucé dans le secret de la tempête ; je t’ai mis à l’épreuve aux eaux de la contradiction1». C’est là une vérité, mes frères: celui qui a été exaucé dans le secret de la tempête, doit être éprouvé aux eaux de la contradiction. Lorsqu’il a embrassé la foi, qu’il a été baptisé, qu’il est entré dans les voies de Dieu, qu’il a fait couler comme une huile pure dans le vase préparé, et qu’il s’est séparé de cette lie qui coule vulgairement dans les rues, il trouve beaucoup de persécuteurs, beaucoup d’insolents qui le méprisent, le dissuadent, le menacent dès qu’ils le peuvent, qui t’effraient, et vont jusqu’à l’abattre. C’est là l’eau de la contradiction. Je ne doute pas qu’il n’y ait ici de ces menées, je me persuade qu’il est ici des fidèles, que leurs amis voulaient entraîner au cirque, à je ne sais quelle niaiserie dans cette solennité que nous célébrons ceux-ci peut-être les ont au contraire amenés à l’Eglise. Mais soit qu’ils les aient amenés ici, soit qu’ils aient refusé de les suivre au cirque, ils ont été mis à l’épreuve aux eaux de la contradiction. Ne rougis point d’annoncer ce que tu sais, et de défendre la foi contre les blasphémateurs. Si en effet Dieu t’exauce dans le secret de là tempête, c’est que le coeur croit pour arriver à la justice; si tu es éprouvé aux eaux de la contradiction, c’est qu’il faut confesser de bouche pour arriver au salut2. A quoi est maintenant réduite cette eau de la contradiction ? Elle est presque desséchée. Nos pères en ont ressenti la violence quand les nations se soulevaient contre la parole de Dieu, contre les mystères du Christ. L’eau se troublait alors, car l’Apocalypse nous montre que par les eaux il faut souvent entendre les peuples, quand à la vue des grandes eaux, et à cette question : Qu’est-ce que cela? on répond : « Ce sont les peuples3 ». Nos pères ont donc passé par les eaux de la contradiction quand les nations frémirent, quand les peuples formèrent de vains complots, quand les rois de la terre se levèrent, et que les princes se liguèrent contre le Seigneur et contre son Christ4. Ce frémissement des peuples, c’était le lion rugissant, barrant le passage à Samson qui allait chercher une épouse chez les étrangers, c’est-à-dire au Christ qui descendait chez les Gentils pour s’unir à l’Eglise, Mais que fit le Seigneur? Il saisit ce lion redoutable, puis le broya, le mit en pièces : ce ne fut dans ses mains qu’un jeune chevreau. Qu’était-ce que toute la rage de ce peuple, sinon la langueur du péché? Détruisez cette cruauté, et les rois ne frémissent plus contre le Christ, les gentils ne l’attaquent plus avec cette colère : nous trouvons au contraire chez les nations des lois favorables à l’Eglise, c’est le rayon de miel dans la gueule du lion5. Pourquoi craindrais-je cette eau de la contradiction qui est presque desséchée? Elle se tairait presque, si le marc ne soulevait la contradiction. Quelle que soit la fureur des étrangers, si du moins les méchants d’entre nous ne les secondaient point! « Je t’ai entendu dans le secret de la tempête, je t’ai mis à l’épreuve aux eaux de la contradiction » .Vous vous souvenez de ce qui est dit du Christ, qu’il est né pour la ruine de plusieurs, comme pour la résurrection de plusieurs, et pour être un signe de contradiction6. Nous le savons, et nous le voyons. La croix se dresse comme un signe, et on la contredit. On contredit à la gloire de la croix; mais la croix était surmontée d’un titre que l’on ne pouvait altérer. Car il est dit dans un psaume : « Pour l’inscription du titre, ne l’altérez point7 ». C’était là un signe de contradiction, et les Juifs dirent à Pilate : « N’écrivez point roi des Juifs, mais écrivez qu’il s’est dit roi des Juifs8 ». Alors la contradiction fut vaincue, et Pilate répondit : « Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit ». « Je t’ai exaucé dans le secret de la tempête, je t’ai mis à l’épreuve aux eaux de la contradiction ».