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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) De opere et eleemosynis Du travail des Moines

CHAPITRE XI. ICI, COMME AILLEURS, PAUL OBÉIT A UN SENTIMENT DE COMMISÉRATION POUR LES FAIBLES. — IL CRAINT, EN VIVANT DE L'ÉVANGILE, QUE LES FAIBLES NE S'IMAGINENT QUE L'ÉVANGILE SE VEND.

12. En preuve, toutefois, qu'il n'agissait ainsi que par condescendance pour l'humaine faiblesse, écoutons ce qui suit: « Car étant, dit-il, libre à l'égard de tous, je me suis rendu serviteur de tous, pour gagner à Dieu plus de personnes. J'ai vécu avec ceux qui « sont sous la loi, comme si j'avais encore été sous la loi, bien que je n'y fusse plus assujéti, pour gagner ceux qui sont sous la loi; avec ceux qui n'avaient pas la loi, comme si je n'en eusse pas en moi-même (bien que j'en eusse une à l'égard de Dieu, ayant celle de Jésus-Christ),pour gagner ceux qui n'avaient pas la loi » ,

La ruse ni la feinte n'inspiraient point ici sa conduite, mais bien la condescendance et la miséricorde. Je veux dire qu'il ne voulait pas se faire passer pour juif, comme quelques-uns l'ont conclu1 de ce qu'à Jérusalem il observait les rites de l'ancienne loi. Il agit alors, en effet, d'après cette maxime que lui-même a franchement et hautement formulée: « Quelqu'un est-il appelé étant déjà circoncis? Qu'il ne prétende pas au prépuce2 », c'est-à-dire qu'il se garde de vivre comme s'il était entré avec le prépuce, comme s'il avait réparé le dépouillement de sa chair. En ce cas, en effet, et l'Apôtre le déclare en un autre endroit : « Votre circoncision est devenue prépuce3 ». Saint Paul était donc conséquent avec cette maxime bien arrêtée qui lui faisait dire: « Un circoncis est-il appelé? Qu'il ne prétende plus au prépuce. Un autre est-il appelé sans circoncision? Qu'il ne se fasse point circoncire ». Par suite, il a tenu franchement la conduite qui parut une feinte aux yeux d'hommes sans attention ou sans connaissance de son état. Car il était Juif et déjà circoncis, quand il fut appelé à la foi; il ne voulut donc pas se couvrir du prépuce, c'est-à-dire, il se garda de vivre comme s'il n'avait jamais été circoncis, bien qu'il eût le droit dès lors de tenir cette conduite. — Il n'était pas sans doute sous la loi, comme ceux qui l'observaient servilement; mais toutefois il était assujéti à la loi de Dieu et de Jésus-Christ. Car la loi n'était pas autre chose que la loi de Dieu même, bien que les Manichéens pervers aient coutume de faire cette distinction. Autrement, et si, d'après eux, l'Apôtre doit passer pour avoir simulé le Judaïsme quand il en observa les rites, il faut dire qu'il a simulé aussi le paganisme et sacrifié aux idoles, puisqu'il avoue s'être affranchi de la loi avec ceux qui n'avaient pas la loi, désignant ainsi évidemment les gentils, que nous appelons les païens.

Admettons donc trois états à l'égard de la loi: l'homme a été sous elle, en elle, et sans elle. Sous la loi, vous trouvez les Juifs charnels. Dans la loi, les Juifs spirituels et les Chrétiens; d'où l'on voit que ceux-ci gardèrent ces prescriptions de leurs pères, mais sans prétendre imposer aux païens convertis cet insupportable fardeau; et c'est pour cela qu'eux-mêmes étaient circoncis. Enfin, sans la loi vivaient les Gentils qui n'avaient pas encore embrassé la foi. L'Apôtre déclare s'être conformé à eux par une condescendance miséricordieuse, et non par une métamorphose odieuse et hypocrite. Comprenons donc qu'il venait en aide au juif charnel et au païen dans la mesure où lui-même aurait voulu être aidé s'il avait été païen ou juif; heureux de porter par miséricorde les dehors de leurs faiblesses, sans pour cela les séduire par des évolutions mensongères. Aussi a-t-il le droit de poursuivre et de dire aussitôt : « Je me suis fait faible avec les faibles, pour gagner les faibles à Dieu ». Il partait de ce principe, pour énoncer toutes les autres maximes que nous venons d'entendre. Se faire faible pour les faibles, n'était point mentir: de même, tous ses actes énoncés plus haut n'étaient pas des mensonges.

Car, en particulier, quelle faiblesse avoue-t-il avoir commise en faveur des faibles ? Aucune ; mais, par condescendance pour eux et seulement pour n'avoir pas l'air de vendre l'Evangile, craignant même d'encourir de fâcheux soupçons qui auraient empêché le progrès de la parole sainte chez ces hommes ignorants des choses, l'Apôtre ne voulut pas même accepter ce qui lui était dû d'après le droit fondé par Jésus-Christ. L'eût-il voulu recevoir, qu'il n'eût trompé personne, puisque c'était une dette; il n'a pas trompé davantage en refusant de l'accepter. Car il n'a pas nié l'existence de cette créance; il l'a même prouvée comme certaine tout en déclarant qu'il n'en avait point usé, et qu'il ne voulait point en user. Voilà, en définitive, en. quoi il s'est fait faible. il a refusé d'user de son droit, tant il se revêtait d'amour et de miséricorde, ne pensant qu'aux procédés dont il aurait voulu qu'on se servît envers lui, s'il avait été lui-même assez faible pour soupçonner de mercantilisme les prédicateurs de l'Evangile, en les voyant accepter leur salaire.


  1. Voir S. Jérôme. Lettre LXXV, inter Augustinianas.  ↩

  2. I Cor. VII, 18.  ↩

  3. Rom. II, 25. ↩

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