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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) De opere et eleemosynis Du travail des Moines

CHAPITRE XXIX. OCCUPATIONS DE SAINT AUGUSTIN. — IL PRÉFÉRERAIT TRAVAILLER COMME LES MOINES, A DES HEURES DÉTERMINÉES.

37. Nous ne lions pas des fardeaux pesants; nous ne les plaçons sur vos épaules sans vouloir nous-mêmes y toucher du doigt1. Etudiez-nous, et convenez que nos occupations sont pénibles, que plusieurs parmi nous portent un corps malade et affaibli, qu'enfin les églises dont nous sommes les serviteurs ont certains usages, qui ne nous permettent pas de vaquer aux travaux que nous vous exhortons de pratiquer.

Sans doute nous serions en droit de dire « Qui est-ce qui jamais servit sous les drapeaux à ses frais? Qui donc plante une vigne sans manger de son fruit? Qui donc mène un troupeau sans en boire le lait2? » — Et cependant j'ose sur mon âme prendre Jésus à témoin, parce qu'ici je parle en son nom avec toute sécurité : Si je ne consultais que mon avantage personnel, combien j'aimerais chaque jour, à des heures déterminées, comme c'est la règle dans les monastères bien gouvernés, m'imposer quelque travail des mains, et avoir tout le reste de mon temps libre et disponible pour lire, pour prier; pour m'occuper de quelque point d'Ecriture sainte ! Quelle douce vie, en regard de celle où l'on doit subir les embarras si bouleversants de causes qui vous sont étrangères et suscitées uniquement à propos d'affaires séculières, qu'il faut trancher par un jugement ou prévenir par une sage intervention.

Voilà un genre d'ennuis auquel l'Apôtre nous a enchaînés, non par son décret sans doute, mais par celui du Maître qui dictait ses paroles. Et toutefois, nous ne lisons pas que l'Apôtre lui-même ait subi cette sorte d'embarras : son apostolat l'entraînait à de tout autres labeurs. Il n'a pas dit : « Si donc vous avez des différends entre vous pour les affaires du siècle», soumettez-nous les causes, ou établissez-nous vos juges ; mais bien

« Prenez pour arbitres les hommes les plus bas placés dans l'Eglise. Ou plutôt, car je parle pour vous faire honte, n'y a-t-il donc point parmi vous une seule personne sage, qui puisse être juge entre ses frères ? Faut-il au contraire qu'un frère plaide contre son frère, et encore devant les infidèles3 ? » — C'est donc parmi les simples fidèles fixés dans la localité même et d'ailleurs remarquables par leur sagesse, ce n'est pas parmi les prédicateurs obligés de courir çà et là pour l'Evangile, que saint Paul a voulu faire choisir les examinateurs d'affaires semblables. Aussi n'a-t-il jamais été écrit de lui qu'il se soit occupé de choses de ce genre; tandis que nous ne pouvons nous excuser à cet endroit, nous, personnages si misérables pourtant; car, à défaut de sages, l'Apôtre veut des juges même de ce peu de valeur, plutôt que de laisser porter au barreau profane les affaires des chrétiens. Nous acceptons toutefois ce rude travail, encouragés par les consolations d'en-haut, animés par l'espérance de la vie éternelle, voulant enfin porter du fruit par la patience. Serviteurs de l'Eglise de Dieu, nous nous devons surtout à ses membres les plus infirmes, bien que dans cet admirable corps nous ne soyons que des membres sans mérite. Je passe sous silence d'autres soucis innombrables de l'ordre spirituel, que nul peut-être ne soupçonne s'il n'en a pas fait l'expérience, et je reviens à dire : Non, nous ne lions point de lourds fardeaux; nous ne les plaçons pas sur vos épaules, sans vouloir nous-mêmes y toucher du doigt. Dieu voit notre disposition, en effet, puisqu'il connaît nos coeurs : oui, si l'échange nous était possible sans faillir à notre devoir, nous aimerions mieux embrasser les oeuvres à la pratique desquelles nous vous exhortons, que celles dont l'accomplissement nous est imposé. Sans doute, tous sans exception, vous comme nous, en travaillant chacun dans notre rang et notre devoir, nous marchons dans la voie étroite, dans la peine et la souffrance ; mais les joies de l'espérance nous rendent aussi le joug du Seigneur bien doux et son fardeau bien léger; c'est lui, en effet, qui nous convie au repos, après avoir lui-même traversé la vallée de larmes où il n'a point vécu non plus sans douleur.

Si donc vous êtes et nos frères, et nos fils, et les co-serviteurs d'un même maître; ou plutôt, si nous sommes vos serviteurs en Jésus-Christ, écoutez nos avis, reconnaissez nos préceptes, acceptez notre doctrine. Si, au contraire, nouveaux Pharisiens, nous lions des fardeaux pesants pour les placer sur vos épaules, faites ce que nous vous disons, tout en blâmant ce que nous faisons4. Nous nous inquiétons fort peu, au reste, d'être jugés par vous ou par toute autre puissance humaine5. La pureté de l'amour qui nous inspire cet intérêt pour vous, est sous l'oeil de Dieu. Qu'il en juge, puisqu'il nous a inspiré les idées mêmes que nous plaçons maintenant sous ses yeux. Enfin; pensez de nous ce que vous voudrez. Seulement, l'apôtre saint Paul vous commande et vous conjure dans le Seigneur de manger votre pain en travaillant en silence, c'est-à-dire paisiblement et sous la règle de l'obéissance'. Or, je le crois, vous n'avez contre l'Apôtre aucun soupçon mauvais, vous avez même une foi parfaite en Celui qui parle par cette bouche inspirée. 6


  1. Matt. XXIII, 4.  ↩

  2. I Cor. IX, 7. ↩

  3. I Cor. VI, 46. ↩

  4. Matt. XXIII, 3.  ↩

  5. I Cor. IV, 3. ↩

  6. II Thess. III, I2. ↩

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