PRÉFACE.
Je crois avoir assez réfuté, dans les cinq livres précédents, ceux qui pensent qu’on doit honorer d’un culte de latrie1, lequel n’est dû qu’au seul vrai Dieu, toutes ces fausses divinités, convaincues par la religion chrétienne d’être de vains simulacres, des esprits immondes ou des démons, en un mot, des créatures et non le Créateur. Je n’ignore pas toutefois que ces cinq livres et mille autres ne puissent suffire à satisfaire les esprits opiniâtres. La vanité ne se fait-elle pas un point d’honneur de résister à toutes les forces de la vérité? et cependant le vice hideux de l’obstination tourne contre les malheureux mêmes qui en sont subjugués. C’est une maladie incurable, non par la faute du médecin, mais par celle du malade. Quant à ceux qui pèsent ce qu’ils ont lu et le méditent sans opiniâtreté, ou du moins sans trop d’attachement à leurs vieilles erreurs, ils jugeront, j’espère, que nous avons plus que suffisamment résolu la question proposée, et que le seul reproche qu’on nous puisse adresser est celui d’une surabondance excessive. Je crois aussi qu’ils se convaincront aisément que cette haine, qu’on excite contre la religion chrétienne à l’occasion des calamités et des bouleversements du monde, passion aveugle ressentie par des ignorants, mais que des hommes très-savants, possédés par une rage impie, ont soin de fomenter contre le témoignage de leur conscience, toute cette haine est l’ouvrage de la légèreté et du dépit, et n’a aucun motif raisonnable.
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Nous avons dit plus haut (livre V, ch. 15) que la théologie chrétienne distingue deux sortes de cultes : le culte de dulie (du grec douleia), et le culte de latrie (du grec latreia). Sans insister sur les différences d’étymologie, nous emprunterons à saint Augustin lui-même (Quœst. in Exod., qu. 94) la définition précise de ces deux cultes On doit à Dieu, dit-il, le culte de doue à titre de Seigneur; on lui doit celui de latrie à titre de Dieu et à ce titre seul » . — Voyez plus loin le livre X, chap. 1. ↩