Traduction
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Contre Fauste, le manichéen
CHAPITRE PREMIER. OPINION DE FAUSTE.
Fauste. Recevez-vous l'apôtre saint Paul? — Assurément. — Pourquoi donc ne croyez-vous pas que le Fils de Dieu est né de la race de David selon la chair[^1] ? — Je ne pouvais croire que l'Apôtre se fût contredit lui-même dans ses écrits, en professant des sentiments différents sur la personne du Seigneur. Mais puisque cela vous plaît ainsi, et qu'on ne peut, sans vous effaroucher, vous parler d'interpolation dans les écrits de l'Apôtre, je soutiens néanmoins qu'il n'y a rien là d'opposé à nos doctrines. Paul, comme tant d'autres, avait pensé que Jésus était fils de David; c'était là sa première et son ancienne opinion sur la personne du Seigneur; mais à peine en a-t-il découvert la fausseté, qu'il la réforme et la rejette; il écrit aux Corinthiens : « Nous ne connaissons, dit-il, personne selon la chair; et si nous avons connu le Christ selon la chair, maintenant nous ne le connaissons plus de cette sorte ». Remarquez toute la différence qui existe entre ces deux chapitres, dans l'un desquels il professe que Jésus est fils de David selon la chair, et dans l'autre il affirme qu'il ne connaît plus personne selon la chair. S'ils sont tous les deux de Paul, ils ne peuvent l'être que de la manière que je viens de dire; autrement l'un ou l'autre est apocryphe. Il ajoute: « C'est pourquoi si quelqu'un est devenu une nouvelle créature en Jésus-Christ, il a déposé ce qui était vieux, et tout s'est renouvelé en lui[^2] ». Vous voyez que l'Apôtre appelle ancienne et transitoire cette foi par laquelle il croyait d'abord que Jésus est issu de la race de David selon la chair ; nouvelle au contraire et permanente, cette autre foi en vertu de laquelle il ne connaît plus personne selon la chair. C'est ce qui lui fait dire ailleurs : « Quand j'étais enfant, je parlais en enfant, je jugeais en enfant, je raisonnais en enfant ; mais lorsque je suis devenu homme, je me suis défait de tout ce qui tenait de l'enfant[^3] ». S'il en est ainsi, peut-on nous reprocher d'embrasser cette nouvelle profession de foi de l'Apôtre qui est la meilleure, et de rejeter l'autre qui est défectueuse? S'il vous plaît à vous de croire selon ce qu'il écrit aux Romains, pourquoi ne nous serait-il pas permis d'enseigner selon ce qu'il écrit aux Corinthiens? Cette manière de vous répondre n'est qu'une concession que je fais à l'obstination de votre esprit. Car loin de la pensée de l'Apôtre de renverser jamais ce qu'il a établi, dans la crainte de se constituer lui-même prévaricateur, ainsi qu'il le proteste[^4]. Si toutefois ce premier sentiment est de lui, il est maintenant réformé; et s'il n'est pas possible qu'une erreur soit sortie de la bouche de Paul, il ne lui appartient pas.
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Rom. I, 3.
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II Cor. V, 17.
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Cor. XIII, 11.
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Galat. II, 18.
Edition
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Contra Faustum Manichaeum libri triginta tres
1.
Faustus dixit: _Apostolum accipis?_Et maxime. _Cur ergo non credis filium dei ex semine David natum secundum carnem? _Non equidem crediderim apostolum dei contraria sibi scribere potuisse et modo hanc, modo illam de domino nostro habuisse sententiam. p. 313,8 Sed quia vobis ita placet, qui numquam sine stomacho auditis aliquid esse in apostolo cauponatum, ne hoc quidem nobis scias esse contrarium, si quidem haec vetus videatur esse et antiqua opinio Pauli de Iesu, cum eum et ipse David filium putaret ut ceteri, quod tamen ubi falsum didicit, interpolat et infirmat scribensque ad Corinthios nos inquit neminem novimus secundum carnem ; et si cognovimus secundum carnem Christum, sed nunc iam non novimus. Quare consideres oportet, quantum intersit inter haec duo capitula, e quibus unum perhibet Iesum filium David secundum carnem, alterum vero iam se neminem nosse secundum carnem. p. 313,19 Quae si utraque sunt Pauli, aut hac ratione erunt, qua dixi, aut unum ipsorum non erit Pauli. Prosequitur deinde: Itaque inquit si qua est in Christo nova creatura, vetera transierunt, ecce facta sunt omnia nova. Vides ergo eum veterem appellare et transitoriam fidem illam priorem, id est Iesum credidisse ex semine David secundum carnem, novam vero hanc secundam et permanentem, quia neminem iam noverit secundum carnem. Quapropter et alibi cum essem inquit parvulus, ut parvulus loquebar, ut paruulus sapiebam, ut parvulus cogitabam; cum autem factus sum vir, quae parvuli erant, evacuavi. Quod si ita est, quid ergo et nos indignum facimus, si novam et meliorem Pauli tenentes confessionem veterem illam ac deteriorem proicimus ? Aut si vobis secundum quod ad Romanos scribit credere cordi est, nobis quare licitum non sit secundum quod ad Corinthios dogmatizare? Quamvis et hoc ad duritiam vestram ita responderim, alioquin absit apostolum dei, quod aedificavit, umquam destruere, ne se ipse praevaricatorem constituat, ut contestatus est. Verumtamen si eius est prior illa sententia, nunc emendata est; sin fas non est Paulum inemendatum dixisse aliquid umquam, ipsius non est. p. 314,10