CHAPITRE LXIV. POURQUOI LE CHRIST A VOULU NAÎTRE DE PARENTS BONS ET DE PARENTS MAUVAIS.
Du reste, Fauste n'a voulu ici que donner au Christ un coup de dent en passant, parce que nous enseignons que le Sauveur est né de la tribu de Juda ; il a voulu surtout faire ressortir ce fait que, dans la généalogie du Christ, l'évangéliste Matthieu donne place à Zara, l'enfant que Thamar eut de son inceste[^5]. En effet, s'il en eût voulu à la race de Jacob, et non à la génération du Christ, il avait l'aîné de la famille, Ruben, qui souilla le lit paternel par un acte odieux[^6], par une fornication inconnue, dit l'Apôtre, même chez les Gentils. Jacob ne l'a point passée sous silence, au moment où il bénissait ses enfants; car il a fait peser sur la tête de son fils le poids de son accusation et de son horreur. Fauste nous aurait certainement objecté ce crime qui ne fut point causé par le déguisement d'une femme en prostituée, mais apparaît comme une profanation volontaire de la couche paternelle, si Thamar ne lui eût paru plus odieuse pour avoir désiré être mère, que si elle eût cédé à l'impulsion de la convoitise de la chair, et s'il n'avait cru ébranler la foi à l'incarnation, en jetant le blâme sur les ancêtres du Christ : ignorant, le misérable, que ce très-vrai et très-véridique Sauveur ne s'est pas montré notre maître seulement par sa parole, mais aussi par sa naissance. En effet, les fidèles qui devaient lui venir de toutes les nations avaient besoin de la leçon de sa naissance selon la chair, pour savoir que les iniquités de leurs pères ne pouvaient leur nuire. C'est pourquoi cet époux, s'accommodant à la condition de ses conviés, et devant un jour inviter à ses noces les bons et les méchants[^1], a voulu naître de bons et de méchants, pour mieux prouver que la pâque prophétique où il était prescrit de manger un agneau et un chevreau[^2], images du juste et de l'injuste, n'était qu'une figure dont il était lui-même l'objet. Toujours fidèle aux lois divines et humaines, il n'a pas dédaigné, en vue de son humanité, d'avoir des parents bons et mauvais; mais, à raison de sa divinité, il a voulu naître miraculeusement d'une vierge.
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Matt. XIII; Gen. XXXVIII, 30.
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Gen. XXXV, 22.
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Matt. XXII, 10.
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Ex. XII, 3-5.