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De la trinité
CHAPITRE II.
DANS LE SOUVENIR, LA VUE ET L’AMOUR DE LA FOI TEMPORELLE, ON DÉCOUVRE UNE CERTAINE TRINITÉ QUI N’EST CEPENDANT PAS ENCORE L’IMAGE DE DIEU.
- Comme il est écrit: « Pendant que nous sommes dans ce corps, nous voyageons loin du Seigneur: car c’est par la foi que nous marchons, et non par une claire vue (II Cor., V, 6, 7 ) », il s’ensuit que tant que le juste vit de la foi (Rom., I, 17 ), bien qu’il vive selon l’homme intérieur et qu’à l’aide de la foi temporelle il tende à la vérité et aux biens éternels, néanmoins l’espèce de trinité qui résulte du souvenir, de la vue et de l’amour de la foi temporelle, ne peut pas encore être appelée image de Dieu. On serait exposé à fonder sur les choses du temps ce qui ne peut être établi que sur celles de l’éternité. En effet, l’âme humaine en voyant sa propre foi, qui lui fait croire ce qu’elle ne voit pas, ne voit point une chose éternelle. Car ce n’est point une chose éternelle, celle qui cessera d’être, quand, au terme de ce pèlerinage où nous voyageons loin du Seigneur et où il faut marcher par. la foi, viendra cette claire vue où nous verrons face à face (I Cor., XIII, 12 ); tout comme aujourd’hui, en croyant sans voir, nous méritons de voir et de nous réjouir de la claire vue où la foi nous aura conduits. Car là, la foi qui croit sans voir n’existera plus, mais bien la claire vue qui fera voir ce qu’on croyait. Et alors le souvenir de cette vie mortelle et de la foi aux choses que nous ne voyions pas, sera compté parmi les choses passées et éphémères, et non parmi les choses présentes et immortelles. Par conséquent la trinité qui consiste dans le souvenir, la vue et l’amour de cette foi qui subsiste présentement ici-bas, ne sera pas davantage permanente, mais une chose à jamais passée ; d’où il résulte que si cette trinité est déjà une image de Dieu, il faut aussi considérer cette image comme une chose transitoire et non immortelle.
A Dieu ne plaise que, la nature de l’âme étant immortelle et ne pouvant plus cesser d’être, dès qu’elle a commencé d’exister, ce qu’elle a de meilleur ne partage pas son immortalité. Or, qu’y a-t-il de meilleur dans sa nature que d’avoir été faite à l’image de son Créateur (Gen., I, 27 )? Ce n’est donc pas dans le souvenir, la vue et l’amour d’une foi passagère, mais dans ce qui durera toujours qu’il faut trouver ce qu’on doit proprement appeler l’image de Dieu.
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De Trinitate
II.
[II 4] Quapropter, quoniam sicut scriptum est: Quamdiu sumus in corpore peregrinamur a domino; per fidem enim ambulamus non per speciem, profecto quamdiu iustus ex fide vivit, quamvis secundum interiorem hominem vivat, licet per eandem temporalem fidem ad veritatem nitatur et tendat aeternam, tamen in eiusdem fidei temporalis retentione, contemplatione, dilectione nondum talis est trinitas ut dei iam imago dicenda sit ne in rebus temporalibus constituta videatur quae constituenda est in aeternis. Mens quippe humana cum fidem suam videt qua credit quod non videt non aliquid sempiternum videt. Non enim semper hoc erit, quod utique non erit quando ista peregrinatione finita qua peregrinamur a domino ut per fidem ambulare necesse sit species illa succedet per quam videbimus facie ad faciem, sicut modo non videntes, tamen quia credimus, videre merebimur atque ad speciem nos per fidem perductos esse gaudebimus. Neque enim iam fides erit qua credantur quae non videntur, sed species qua videantur quae credebantur. Tunc ergo etsi vitae huius mortalis transactae meminerimus et credidisse nos aliquando quae non videbamus memoriter recoluerimus, in praeteritis atque transactis deputabitur fides ista non in praesentibus rebus semperque manentibus, ac per hoc etiam trinitas ista quae nunc in eiusdem fidei praesentis ac manentis memoria, contuitu, dilectione consistit tunc transacta et praeterita reperietur esse, non permanens. Ex quo colligitur ut si iam imago dei est ista trinitas, etiam ipsa non in eis quae semper sunt sed in rebus sit habenda transeuntibus.