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Issu de la concupiscence, l'homme l'apporte en naissant, et toutefois il ne cesse pas d'être l'oeuvre de Dieu, oeuvre bonne sans doute, mais souillée par le mal originel, jusqu'à ce qu'il soit guéri par la grâce de la régénération. J'avais donc raison de dire : «Le mariage reste bon en lui-même malgré le vice originel qui s'y transmet ; de même l'adultère et la fornication restent des crimes que n'excuse pas le bien naturel qui en résulte1 ». Je dis le bien naturel, et vous l'approuvez avec moi; quant au mal originel, tandis que j'en affirme l'existence, et que vous en repoussez comme moi les mouvements, vous le comblez de louanges et moi je le réprouve. En soi, votre naissance n'est pas un mal, mais vous êtes né avec le mal, et c'est contre lui que vous combattez spirituellement, parce que vous avez été régénéré en Jésus-Christ. Votre naissance est l'oeuvre de Dieu et de vos parents ; quant au mal contre lequel vous luttez, il est le fruit de la prévarication dont le démon fut la source, et dont la grâce de Jésus-Christ est le remède. Si vous voulez faire un bon usage de ce mal dans le mariage, faites-lui dès maintenant en vous une guerre acharnée; à cette condition votre âme restera sans souillure, privilège dont elle ne jouissait pas à votre naissance, car alors elle était coupable et n'a été purifiée que par le bain de la régénération dans lequel vous avez acquis le droit de régner avec Jésus-Christ. Je souhaite toutefois que cette hérésie ne vous fasse point partager le sort du démon, et que, pour y échapper, vous confessiez l'existence de ce mal contre lequel vous luttez, qui n'est point en vous une nature distincte, et dont la complète guérison vous constituera dans une paix perpétuelle.
Du Mariage et de la Concupiscence, liv. I, ch. I. ↩
