11.
Et qu'on ne vienne point dire : La persévérance finale ne saurait, à la vérité, être perdue, quand elle a été donnée, c'est-à-dire quand on a persévéré jusqu'à la fin; mais elle est perdue d'une certaine manière, quand un homme se met par sa désobéissance dans l'impossibilité de l'obtenir : comme nous disons d'un homme qui n'a pas persévéré jusqu'à la fin, qu'il a perdu la vie éternelle ou le royaume de Dieu; non pas en ce sens qu'il avait déjà reçu et qu'il possédait la vie éternelle, mais en ce sens qu'il l'aurait reçue et possédée, s'il avait persévéré : afin donc que personne ne tienne ce langage, et pour faire cesser toute dispute de mots, nous reconnaîtrons qu'on peut perdre certaines choses qu'on n'a pas encore, mais qu'on espère avoir. Mais qui donc osera me dire que Dieu ne peut donner ce qu'il a fait un précepte de lui demander? Certes, un homme qui raisonnerait ainsi, je ne dis pas qu'il manquerait de jugement, je dis qu'il aurait perdu la raison. Or, Dieu a commandé aux saints de lui dire à lui-même dans leurs prières : « Ne nous induisez pas en tentation ». Donc celui qui est exaucé dans cette demande, n'est point induit en une tentation de désobéissance qui lui donnerait le pouvoir ou qui le rendrait digne de perdre la persévérance dans la sainteté.