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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) Contra secundam Iuliani responsionem imperfectum Contre la seconde réponse de Julien
LIVRE PREMIER. LES TROIS PREMIERS ARGUMENTS DE JULIEN.

47.

Jul. C'est le mouvement d'une âme assez avancée en âge pour qu'elle puisse faire usage de sa raison et juger par elle-même; et quand on lui montre le châtiment et la gloire, ou la souffrance et la volupté, on lui offre un secours et comme une occasion, on ne lui impose pas la nécessité de choisir l'un ou l'autre parti. Cette volonté donc, qui peut agir d'une manière ou d'une autre. tient ce pouvoir du libre arbitre ; mais les actes humains sont produits par elle directement; elle-même n'existe point tant que nous ne faisons pas acte de volition, et il nous est impossible de vouloir tant que nous n'avons pas aussi le pouvoir de ne vouloir pas ; et, par rapport au péché, ces deux choses : vouloir et ne vouloir pas, nous manquent également tant que nous n'avons pas encore l'usage de la raison. Ces principes ainsi rappelés brièvement, il est manifeste que cette définition donnée par toi est de la plus rigoureuse vérité : « Le péché est la volonté de retenir ou de recevoir ce que la justice défend, et dont on est libre de se priver», Ainsi, il est certain que ce péché, quia été démontré clairement n'être pas autre chose qu'un acte de la volonté, reçoit son genre, ou, en d'autres termes, tire son origine de la convoitise de chaque homme. Son espèce est déterminée par chacun des objets qu'on appelle atomes. Sa différence naît à la fois de la diversité des fautes et des circonstances de temps. Son mode consiste précisément dans l'absence de tout mode; car si le mode consiste à servir celui que l'on doit servir, quiconque omet ce devoir pèche par là même en s'écartant du mode véritable. Ici cependant on pourrait, mais non pas sans subtilité, dire que le mode du péché consiste en ce que personne ne pèche au-delà de ses propres forces : si on pèche autrement, on ne le fait point par une volonté efficace;on ne peut pécher ainsi que par la volonté seule. Enfin on doit reconnaître la qualité du vies dans le degré d'amertume qu'il entraîne à sa suite, soit par le déshonneur, soit par les souffrances dont il est la cause. Le péché existe donc : s'il n'existait pas, tu n'embrasserais pas toi-même des doctrines erronées; et ce péché n'est pas autre chose que la volonté s'écartant de la voie dans laquelle elle doit pour marcher, et d'où elle est libre de ne point dévier. Il naît de la convoitise des choses défendues, et il se trouve uniquement dans l'homme qui a fait un acte de volonté mauvaise et qui pouvait s'abstenir de cet acte.

Aug. Cette définition donnée par nous et aussi que tu as trouvée exacte, se rapportait au péché d'Adam : « Le péché», disions-nous, « est la volonté de retenir ou d'acquérir ce que la justice défend et dont on est libre de se priver ». Adam, en effet, quand il commit son péché, n'avait en lui absolument aucun principe mauvais qui le portât violemment, et malgré sa volonté contraire, à faire le mal. et qui l'autorisât à dire: « Je ne fais pas le bien que je veux, mais je fais le mal que je ne veux pas faire[^6] » ; et conséquemment il a fait, en commettant le péché, ce que la justice défendait et dont il eût été libre de s'abstenir. Celui au contraire qui dit : « Je fais le mal que je ne veux pas », n'est pas libre de s'abstenir de ce mal. C'est pourquoi apprends à distinguer ces trois choses, et sache que autre chose est le péché, autre chose la punition du péché, autre chose enfin l'un et l'autre réunis, c'est-à-dire, le péché étant à la fuis péché et punition du péché; et tu comprendras aussitôt laquelle de ces trois choses a été définie : « Volonté de faire ce que la « justice défend, et dont on est libre de s'abstenir ». Car le péché ainsi défini n'est pas la punition du péché, il n'est pas non plus l'un et l'autre réunis. Mais ces trois genres ont aussi leurs espèces propres, sur lesquelles nous ne pourrions discuter en ce moment, sans entrer dans de trop longs détails. Si l'on veut avoir des exemples de chacun de ces trois genres, nous en trouvons un du premier genre et qui ne présente aucune difficulté, dans la personne d'Adam. En effet, parmi les actions mauvaises que commettent les hommes, il en est beaucoup dont ils sont libres de s'abstenir ; mais cette liberté n'appartient à personne aussi pleinement qu'elle appartenait à celui en qui le regard de Dieu, par qui il avait été créé de droit, ne découvrait aucune souillure ni aucune dégradation. Un exemple du second genre, où il s'agit uniquement de la peine du péché, se trouve dans le mal dont un homme n'est en aucune manière l'auteur, triais qu'il souffre seulement. comme lorsque celui qui a commis un crime, subit pour son péché la peine de mort ou tout autre châtiment corporel. Enfin on peut voir un exemple du troisième genre, où il s'agit à la fois du péché en lui-même et de la peine du péché, dans celui qui dit: « Je fais le mal que je neveux pas ». A ce genre se rapportent aussi toutes les actions mauvaises qui, étant commises par ignorance, ne sont pas regardées comme mauvaises, ou même sont regardées comme bonnes par ceux qui les commettent. En effet, si l'aveuglement du coeur n'était pas un péché, il serait injuste d'en faire un sujet de reproche : or, il est justement condamné dans ces mots : « Pharisien aveugle»[^1], et en plusieurs autres endroits des divines Ecritures. D'autre part, si ce même aveuglement n'était pas un châtiment du péché, le sage ne dirait point : « Leur propre malice les a aveuglés[^2] » ; et si cela n'arrivait point par un jugement de Dieu, nous ne lirions pas : « Que leurs yeux soient obscurcis, afin qu'ils ne voient point, et courbez sans cesse leur dos[^3] ». Certes, où est l'homme qui est volontairement aveugle de coeur, tandis que personne ne veut être aveugle même de corps? Conséquemment, le péché originel ne se rapporte pas au genre que nous avons placé en premier lieu, et qui consiste dans la volonté de faire le mal dont on est libre de s'abstenir; autrement, le péché originel n'existerait pas dans les enfants qui n'ont pas encore l'usage du libre arbitre de la volonté. Il ne se rapporte pas non plus au genre dont nous avons parlé en second lieu ; car il s'agit ici du péché, non point du châtiment qui n'est pas un péché, quoiqu'il soit une juste suite du péché : il est vrai due les enfants eux-mêmes subissent ce châtiment, puisqu'il y a en eux un corps qui est mort à cause du péché[^4] ; mais la mort du corps elle-même n'est pas.un péché, non plus que toute autre souffrance corporelle. Le péché originel se rapporte à ce troisième genre où le péché est à la fois péché et châtiment du péché: il existe avec ce double caractère dans les enfants au moment de leur naissance, et il commence à se révéler en eux à mesure qu'ils croissent, par le besoin qu'ils ont de la sagesse et de la tempérance comme remèdes à leur ignorance et à leur convoitise mauvaise; cependant l'origine de ce péché se trouve aussi dans la volonté de celui qui l'a commis. « Car Adam a existé, et nous avons tous existé en lui ; Adam a péri, et tous ont péri en lui[^5] ».

  1. Rom. VII, 29.

  2. Matt. XXIII, 26.

  3. Sag. II, 21.

  4. Ps. LXVIII, 24.

  5. Rom. VIII, 10.

  6. Ambr. liv. VII, sur le ch. XV de saint Luc, n. 234.

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Contre la seconde réponse de Julien

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