• Accueil
  • Œuvres
  • Introduction Instructions Collaboration Sponsors / Collaborateurs Copyrights Contact Mentions légales
Bibliothek der Kirchenväter
Recherche
DE EN FR
Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) Contra secundam Iuliani responsionem imperfectum Contre la seconde réponse de Julien
LIVRE QUATRIÈME. LE QUATRIÈME LIVRE DE JULIEN.

49.

Jul. Il est facile de voir que des flatteries aussi maladroites, bien loin qu'elles soient nécessaires pour la défense de la foi catholique, sont au contraire un outrage sacrilège fait à cette même foi. En effet, sous prétexte de ne point avilir le corps de Jésus-Christ en le déclarant semblable à nos corps, sous prétexte de l'exalter au-dessus de tous les autres corps humains, Apollinaire le prive en réalité de l'intégrité de ses sens naturels ; il ne voit pas les conséquences fatales qui découlent de l'injure faite ici à la vérité, quoique sous forme de flatterie. Aussi les catholiques indignés lui ont opposé cet argument de prescription dont la force est tout à fait irrésistible : croire de pareilles maximes, c'est faire aux mystères du Sauveur une injure beaucoup plus grande que celle qu'on prétend écarter de ses membres. Quoique Jésus-Christ, disent. ils, soit né de la race de David[^1], quoiqu'il ait été formé d'une femme et soumis à la loi[^2], afin précisément de nous servir de modèle et de nous exciter à marcher sur les traces de Celui qui n'a commis aucun péché et de la bouche duquel nulle parole de tromperie n'est jamais sortie[^3]; s'il est vrai, d'autre part, qu'il n'ait pas pris la nature humaine tout entière et avec toutes ses propriétés, s'il n'a pris qu'un corps sans âme, ou bien si la nature humaine était privée en Lui de cette faculté de sentir qui appartient à tous les autres hommes, il est impossible d'admettre qu'il nous a servi de modèle et qu'il nous a donné l'exemple de la soumission à la loi. Quels éloges a-t-il pu mériter en méprisant le charme des choses sensibles, puisqu'il était, par un bienfait de sa nature, inaccessible aux attraits de ce genre ? Quel héroïsme merveilleux de s'abstenir de tout regard coupable, quand aucun sentiment de convoitise charnelle ne porte les yeux à s'arrêter sur des objets contraires à la modestie ; ou de s'abstenir de savourer aucun parfum corrupteur, quand les organes olfactifs sont incapables de ces sortes de perceptions ? Quelle vertu prodigieuse, d'observer chaque jour une sobriété extrême dans ses repas, quand le sens du goût ne saurait être affecté par la délicatesse des mets plus exquis ? Quelle force surprenante de volonté faut-il avoir pour jeûner pendant quarante jours consécutifs, quand la privation de nourriture ne saurait être une cause de souffrance ? Quel titre acquiert-on à la vénération publique, en ne prêtant jamais l'oreille qu'à des discours honnêtes, si les organes de l'ouïe sont fermés dès la naissance à toute parole inconvenante ? Quelle couronne de gloire mérite celui dont la chasteté est le fruit de son impuissance plutôt que de l'énergie de sa volonté et en qui la faiblesse du corps est la cause réelle de ce que l'on croyait devoir attribuer à la force de l'âme ?

Aug. Cette argumentation est d'une valeur incontestable, non pas contre Apollinaire, ni contre aucun disciple d'Apollinaire; car, si je ne me trompe, ces hérétiques n'ont jamais enseigné que le corps de Jésus-Christ était privé de la faculté de sentir qui appartient aux autres corps humains ; mais contre tout homme qui enseigne une pareille doctrine. Nous, au contraire, nous enseignons que les yeux de Jésus-Christ percevaient la laideur aussi bien que la beauté ; que ses organes olfactifs percevaient également les odeurs agréables et les odeurs désagréables ; que ses oreilles percevaient les sons harmonieux et les sons discordants ; que son palais discernait les mets amers de ceux qui étaient doux; que Lui-même distinguait parfaitement en les touchant les objets rudes et ceux qui ne l'étaient point, les objets durs et les objets mous, ce qui était chaud et ce qui était froid ; en un mot, qu'il pouvait sentir et percevoir tout ce qu'il est possible de sentir et de percevoir par les sens du corps ; que le pouvoir même d'engendrer ne lui aurait pas fait défaut, s'il l'avait voulu : et que cependant la chair n'a jamais convoité en lui contre l'esprit. Si, comme tu le penses, l'exemption de toute faute est un grand bien quand elle est le fruit des victoires remportées sur les passions, et qu'elle perde presque tout son prix dans ceux qui n'ont été assujettis à aucune passion : il s'ensuivra que la vertu d'une homme est d'autant plus digne d'éloges, que la chair de cet homme a été le siée de passions plus ardentes. Et la première conséquence de cette doctrine horrible et tout à fait abominable sera que, Jésus-Christ ayant été le plus grand de tous les hommes par la vertu, il a dû aussi ressentir dans sa chair des passions plus ardentes que celles de tous les autres hommes.

Si tu comprends tout ce qu'il y a d'impie dans une telle maxime, ne diffère pas à changer ton enseignement; et sache distinguer entre la convoitise et les sens qui lui servent souvent d'instruments passifs plutôt que d'instruments actifs: autrement, il faudrait dire qui, dans chaque homme la vivacité du sentiment est d'autant plus grande que les passions charnelles y sont plus ardentes, et il faudrait croire que ces passions étaient d'autant plus enflammées en Jésus-Christ que ses sens étaient plus purs.

  1. Rom. I, 3.

  2. Galat. IV, 4.

  3. I Pierre, II, 12, 22.

pattern
  Imprimer   Rapporter une erreur
  • Afficher le texte
  • Référence bibliographique
  • Scans de cette version
Download
  • docxDOCX (807.81 kB)
  • epubEPUB (782.29 kB)
  • pdfPDF (3.06 MB)
  • rtfRTF (2.97 MB)
Traductions de cette œuvre
Contre la seconde réponse de Julien

Table des matières

Faculté de théologie, Patristique et histoire de l'Église ancienne
Miséricorde, Av. Europe 20, CH 1700 Fribourg

© 2025 Gregor Emmenegger
Mentions légales
Politique de confidentialité