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Œuvres Lactance (250-325) Divinae Institutiones Institutions Divines
LIVRE IV.

XXVI.

J'ai rapporté les raisons pour lesquelles Dieu a voulu prendre un corps faible et passible ; je dirai maintenant celles pour lesquelles il a subi le supplice de la croix, et je découvrirai la puissance qui est cachée sous l'apparence, de la faiblesse de sa mort. Il n'a rien souffert en vain. Toutes ses souffrances ont leur mystère et sont des signes de quelque vérité importante. Sa passion a ce rapport et cette conformité avec ses actions que, bien qu'elles aient produit sur-le-champ de fort notables effets, elles ont présagé de plus rares événements qui devaient arriver en un autre temps. Il a rendu la vue aux aveugles par sa puissance ; mais en la leur rendant, il a marqué qu'il rendait celle du cœur aux nations qui étaient ensevelies dans l'aveuglement et l'erreur. Il a rendu l'ouïe aux sourds; mais sa puissance ne s'est pas arrêtée là; il a marqué qu'il ferait bien retentir la voix du ciel à l'oreille intérieure de ceux qui n'avaient jamais entendu parler de la vérité. Il a rendu la parole aux muets ; c'était sans doute un merveilleux effet de sa puissance ; mais cet effet-là même n'était qu'un signe d'un changeaient plus surprenant, qui devait être bientôt accompli en ceux qui, ayant vécu jusque alors dans, une profonde ignorance des choses de Dieu, en devaient être instruits tout d'un coup et en parler avec une rare éloquence. Le plus fameux orateur du monde n'est qu'un muet quand il ne sait rien des mystères ; mais dès qu'il apprend à parler de la grandeur et de la majesté de Dieu, il commence à faire l'usage qu'il doit de sa langue. Quand elle ne dit que des faussetés, elle ne fait pas la fonction qui lui est propre, et quiconque ne sait pas parler des choses de Pieu est comme un enfant qui ne fait que bégayer, Quand le Seigneur a redressé les boiteux, il a sans doute donné une preuve évidente de sa puissance infinie; mais il a donné en même temps une figure d'un plus grand miracle, qu'il a depuis accompli en ceux qu'il a retirés des égarements de la vie du siècle et qu'il a mis dans le chemin de la vérité, afin qu'en le suivant ils arrivassent heureusement à la grâce. Les véritables boiteux sont ceux qui, étant embarrassés par leur propre ignorance, ne font que de faux pas dans le chemin de la mort.

Le Sauveur a effacé les taches de la lèpre : c'était certainement un effet sensible du pouvoir absolu qu'il exerçait sur les maladies les plus malignes; mais c'était aussi un signe de la force que sa doctrine aurait d'effacer les taches du péché et de guérir les véritables lépreux qui, étant plonges par leur cupidité dans les plaisirs les plus infâmes, sont tout couverts de taches qui font autant de honte que d'horreur. Le Sauveur a rendu la vie aux malades, et les appelant par leur nom, il les a retirés du tombeau et de la corruption. Il n'y a point de miracle si convenable à la grandeur de Dieu, ni si digne de l'admiration de tous les siècles, que de rendre la vie à ceux qui l'uni une fois perdue, que d'ajouter des années à d'autres années dont le nombre semblait limité, que de révéler le secret de la mort. Mais cette puissance, tout inexprimable qu'elle est, n'est que l'image d'une autre plus, grande que sa doctrine devait avoir ; d'appeler à la lumière de la vie une infinité de peuples qui étaient ensevelis sous les ténèbres de la mort. En effet, y a-t-il des morts plus déplorables que ceux qui ne connaissent point Dieu, qui est le principe de la vie, et qui au lieu de s'élever vers le ciel, qui est le lieu de leur origine, s'abaissent vers la terre qui n'est qu'une région de mort. Ainsi les actions les, plus merveilleuses du Sauveur étaient des figures de l'avenir. Les miracles qu'il a faits pour guérir les corps étaient des images de ceux qu'il devait faire pour guérir les âmes, et des preuves non seulement du pouvoir qu'il exerçait sur la nature, mais de celui qu'il avait de communiquer les dons célestes de sa grâce. Sa passion, n'a pas été moins mystérieuse que ses actions : elle n'a rien, çu de fortuit ni d'inutile. Comme les actions miraculeuses qu'il a faites en faveur des corps uni signifié celles qu'il ferait en faveur des âmes; ainsi les tourments qu'il a soufferts par la cruauté des Juifs, signifiaient les persécutions que ceux qui seraient animés de l'esprit de la sagesse souffriraient par l'injustice des juges et par la violence des peines. Le vinaigre qu'on lui a donné à boire, le fiel qu'on lui a donné à manger, ne promettaient que de l'aigreur et de l'amertume durant tout le cours de cette vie à ceux qui auraient le courage de soutenir la vérité. Ses souffrances, qui d'elles-mêmes étaient fâcheuses et amères, nous représentaient les peines et les afflictions auxquelles la vertu est exposée sur la terre. Ce mets et ce breuvage mis dans la bouche de notre maître, nous apprennent combien ceux qui défendent la vérité doivent supporter de misères ; car la vérité est odieuse à ceux qui vivent dans les plaisirs. La couronne d'épines qui fut mise sur sa tête, signifie qu'il assemblerait autour de soi un peuple innocent qu'il avait choisi parmi des coupables. On appelle couronne une assemblée de peuple qui est disposé en rond. Avant que nous connussions Dieu, nous n'étions que des épines, c'est-à-dire des injustes et des coupables. Nous étions éloignés de toutes sortes de bonnes œuvres et capables seulement de faire le mal. Nous avons été cueillis sur les buissons et sur les ronces, et mis sur la tête de notre Dieu, c'est-à-dire que nous sommes assemblés autour de lui, que nous l'écoutons comme notre maître, que nous le respectons comme notre roi.

Pour ce qui est de la croix, elle renferme une puissance admirable que je tâcherai d'expliquer. Dieu ayant résolu de délivrer les hommes de la servitude du péché sous laquelle ils gémissaient, envoya sur la terre un excellent docteur pour leur enseigner la route et pour leur montrer le chemin de la justice par où ils pourraient arriver à la vie éternelle. Il se revêtit d'un corps pour pouvoir donner à l'homme l'exemple des vertus qu'il lui voulait enseigner. Il s'acquitta, dans le cours de sa vie, de tous les devoirs de la justice ; mais pour enseigner aux hommes la patience dans la douleur et le mépris de la mort qui consomme la perfection et la vertu, il voulut bien tomber entre les mains d'une nation impie, bien qu'il lui fût aisé ou de les éviter par la connaissance qu'il avait de l'avenir, ou d'en échapper par la force qu'il avait de faire des miracles. Il souffrit les coups, les tourments, la couronne d'épines, afin que l'homme, suivant son exemple, triomphât de la mort et des tourments qui l'environnent. Dieu le père a eu d'importantes raisons pour choisir principalement ce genre de mort. Quelqu'un dira peut-être : « S'il était Dieu et s'il voulait mourir, que ne mourait-il d'un genre de mort qui fût plus honorable ? Pourquoi est-il mort d'un supplice aussi infâme qu'est celui de la croix, et si indigne d'un homme libre, quand même il serait criminel? » C'est qu'étant venu dans un état de faiblesse et de bassesse, pour secourir les hommes qui n'avaient rien que de faible et de bas, et pour leur faire voir qu'il n'y en avait aucun qui ne dût avoir part à l'espérance du salut, il choisit le genre de mort que l'on faisait souffrir aux personnes les plus viles et les plus méprisables, il eut encore une autre raison, qui fut : de conserver son corps entier, parce que trois jours après il le devait tirer du tombeau.

Personne ne doit ignorer qu'il avait prédit, bien avant sa passion, qu'il avait le pouvoir de rendre son esprit et de le reprendre quand il lui plairait. Quand il eut rendu l'esprit sur la croix, les bourreaux ne crurent pas qu'il fût nécessaire de lui casser les os, comme ils avaient accoutumé de les casser aux autres crucifiés, mais ils se contentèrent de lui percer le coté. Ainsi, son corps fut détaché entier de la croix, et enfermé dans le tombeau, afin qu'il fût plus disposé à ressusciter. Il y a encore une autre raison pour laquelle il a préféré la croix aux autres supplices : c'est qu'elle le devait élever, et comme l'exposer a la vue de toutes les nations. Ceux qui sont attachés à une croix sont vus de tout le monde. Le Sauveur y a été attaché pour marquer qu'il serait un jour si fort élevé et dans un état si éclatant que les peuples les plus éloignés viendraient en foule le reconnaître et l'adorer. Il n'y en a point aussi de si reculé ni de si barbare qu'il ne sache quelle a été sa passion, et quelle est la gloire dont il jouit. Il étendit les mains sur la croix et embrassa en quelque sorte tout le monde, pour montrer qu'une multitude prodigieuse, dans laquelle il se trouverait des peuples de toutes sortes de langues et de toutes sortes de tribus, viendrait d'Orient et d'Occident s'assembler sous ses bras et recevoir son signe au front.

On a une figure de cette merveille dans une cérémonie que les Juifs pratiquent encore aujourd'hui, quand ils marquent le seuil de leur porte avec le sang de l'agneau. Quand Dieu voulut frapper de mort les Égyptiens et préserver les Hébreux de ce fléau, il leur commanda d'immoler un agneau sans tache et de faire une marque sur le seuil de leurs portes avec son sang. Ainsi tous les premiers nés des Égyptiens furent tués en une nuit sans que les enfants des hébreux souffrissent aucun mal. Ce n'est pas que le sang d'une bête eût la force de les sauver; mais c'est que l'agneau que les Juifs immolèrent alors était la figure de Jésus-Christ, qui est l'agneau sans tâche, innocent, juste et saint, qui, ayant été immolé par les Juifs, sauve tous ceux qui mettent sur leur front le signe de son sang, c'est-à-dire le signe de la croix sur laquelle il l'a répandu. Le front est comme le seuil de l'homme. Le bois marqué avec du sang est une image de la croix. Le sacrifice de l'agneau est appelé pâque, c'est-à-dire passion. Quand il a été célébré de la manière que Dieu l'avait ordonné par le ministère de Moïse, il a servi à préserver les enfants des Hébreux de la mort du corps, mais il a été une figure de la force qu'aurait le sacrifice de Jésus-Christ pour sauver tout son peuple. J'expliquerai dans le dernier livre de cet ouvrage de quelle façon seront préservés ceux qui auront sur la partie la plus haute et la plus apparente de leur corps le signe du sang d'un Dieu.

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