V.
Le Seigneur a enduré que sa chair fût livrée à la destruction ; c'était en vue de nous purifier par la rémission des péchés laquelle s'opère par l'aspersion de son sang. [2] L'Écriture parle de lui à ce sujet, en partie pour Israël, en partie pour nous, et s'exprime ainsi :
« Il a été blessé à cause de nos iniquités,
Il a été brutalisé à cause de nos péchés ;
Nous avons été guéris par sa meurtrissure ;
On l’a conduit comme une brebis à regorgement,
Et comme un agneau sans voix devant le tondeur ».
[3] Nous devons donc exprimer au Seigneur notre extrême reconnaissance de ce qu'il nous a fait connaître le passé, expliqué le présent, donné une certaine intelligence de l'avenir. [4] Or l'Écriture porte que « ce n'est pas à tort qu'on tend les filets pour les oiseaux », ce qui veut dire que l'on mérite de périr lorsque ayant connaissance du chemin de la justice, on se tient dans le chemin des ténèbres.
[5] Autre chose encore, mes frères : si le Seigneur a enduré de souffrir pour nos âmes, quoiqu'il fût le Seigneur de l'univers, à qui Dieu a dit dès la fondation du monde : « Faisons l'homme à notre image et ressemblance », comment du moins a-t-il enduré de souffrir par la main des hommes ? Apprenez-le : [6] les prophètes, par une grâce qu'ils tenaient de lui, ont émis des prophéties à son sujet. Or comme il fallait qu'il se manifestât dans la chair pour abolir la mort et prouver la résurrection d'entre les morts, il a enduré de souffrir ainsi [7] afin d'acquitter la promesse faite à nos pères, afin de se préparer pour lui-même le peuple nouveau, et de montrer dès le temps de son séjour sur la terre que c'est lui qui opère la résurrection des morts, lui qui procédera au jugement. — [8] Enfin, tandis qu'il instruisait Israël et accomplissait des miracles et des signes si prodigieux, il prêcha et lui témoigna un amour sans mesure ; [9] puis il choisit pour ses apôtres, pour les futurs prédicateurs de son évangile, des hommes coupables des pires péchés, afin de montrer qu'« il n'est point venu appeler les justes, mais les pécheurs », il fit bien connaître alors qu'il était le fils de Dieu. — [10] S'il n'était pas venu dans la chair, comment les hommes fussent-ils demeurés sains et saufs à sa vue, puisqu'en face du soleil qui s'achemine au néant et qui est l'ouvrage de ses mains, ils ne peuvent lever les yeux et en fixer les rayons. — [11] Si le fils de Dieu est venu dans la chair, c'est donc pour mettre le comble aux péchés de ceux qui ont poursuivi ses prophètes à mort. [12] Voilà donc pourquoi il a enduré de souffrir. Dieu dit en effet que la plaie de sa chair, c'est d'eux qu'elle lui vient : « Lorsqu'ils auront frappé leur berger, les brebis du troupeau périront ». — [13] Mais c'est lui qui a résolu de souffrir en la manière (que l'on sait), car il fallait qu'il souffrît sur le bois ; le prophète en effet dit à son endroit : « Épargne mon âme avec l'épée », et : « perce de clous mes chairs, car des troupes de coquins se sont dressées contre moi », [14] et ailleurs encore :
« Vois, j'ai présenté mon dos aux fouets
Et mes joues aux soufflets ;
J'ai raidi mon visage comme une pierre dure ».