XXXIV.
Au reste, que tout ait été formé de rien, la disposition qui doit tout faire rentrer dans le néant ne nous en convaincra que mieux. En effet, « le ciel sera roulé comme un livre, » ou plutôt ils disparaîtra complètement avec la terre elle-même, qui fut créée en même temps que lui dès le commencement. « Le ciel et la terre passeront, » est-il dit. « Le premier ciel et la première terre avaient disparu, et on ne trouvait même plus la place où ils avaient été, » parce que la chose qui finit perd jusqu'à la place qu'elle occupait. Même langage dans David: « Les cieux sont l'ouvrage de tes mains, et ils périront; tu les changeras comme un manteau, et ils seront changés; » mais changer, c'est quitter son premier état perdu par ce changement. « Les étoiles tomberont du ciel comme le figuier, lorsqu'ébranlé par un vent violent, il perd ses fruits encore verts. Les montagnes fondront comme la cire en la présence du Seigneur, lorsqu'il se lèvera pour briser la terre. ---- Je dessécherai les marais. ---- Ils chercheront de l'eau et ils n'en trouveront plus, pas même la mer. » Voulût-on assigner une interprétation spirituelle à tous ces oracles, on ne pourrait cependant détruire la vérité des événements, qui s'accompliront tels qu'ils furent écrits. En effet, s'il y a des figures, il faut nécessairement qu'elles soient empruntées aux êtres réels et non aux chimériques, parce que rien ne peut communiquer de son propre fonds sa ressemblance à une autre chose, à moins d'être lui-même identique à cette ressemblance.
Je reviens donc au principe qui établit que tout ce qui a été tiré du néant retombera dans le néant. Dieu n'aurait pas créé de ce qui est éternel, c'est-à-dire de la Matière, quelque chose de périssable, ni de ce qui est plus élevé des êtres inférieurs, parce qu'il est bien plus digne de lui de tirer de ce qui est inférieur des êtres supérieurs, c'est-à-dire de ce qui est périssable ce qui est éternel. Telle est la promesse qu'il fait à noire chair. Il a voulu déposer au fond de nous-mêmes un gage de sa vertu et de sa puissance, afin de nous disposer à croire que l'universalité des créatures qui étaient comme mortes, puisqu'elles n'existaient pas, ont été réveillées du néant par lui, pour être appelées à l'existence.
