Traduction
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De la grandeur de l'âme
47.
Aug. Je suis à tes ordres, et plus volontiers lorsque tu m'arrêtes que lorsque tu me pousses ; mais redouble d'attention, ce que je vais dire nous servira beaucoup. Une définition ne doit contenir ni plus ni moins que ce que l'on se propose d'expliquer, autrement elle est vicieuse; or c'est en la convertissant, que l'on juge si elle n'a aucun défaut : c'est ce que vont éclaircir pour toi quelques exemples.
Tu me demandes ce qu'est l'homme, et je t'en donne cette définition : L'homme est un animal mortel. J'ai dit vrai, et néanmoins tu ne dois point aussitôt m'approuver : ajoute le mot tout; puis convertis la définition, afin de voir si elle est vraie aussi après sa conversion; ainsi, il est vrai que tout homme est un animal mortel; est-il également vrai que tout animal mortel soit un homme? Cela n'est pas vrai ; condamne donc la définition comme comprenant ce qui lui est étranger; puisque l'homme n'est pas le seul animal qui soit mortel, et que tout autre animal en est là. Cette définition de l'homme devient plus exacte, si l'on ajoute à mortel l'expression raisonnable; car l'homme est un animal mortel et raisonnable, et comme tout homme est un animal raisonnable et mortel, ainsi tout animal raisonnable et mortel est un homme. Le vice de la première définition était de trop embrasser, car elle embrassait la bête avec l'homme. Celle-ci est exacte, car elle embrasse tout l'homme, et rien que l'homme.
Elle serait vicieuse en embrassant moins, si tu y ajoutais grammairien; car si tout animal mortel, raisonnable et grammairien est un homme, il y a cependant bien des hommes qui ne sont pas grammairiens, et que ne renferme pas cette définition. C'est pourquoi fausse quand on la présente de cette manière, elle dévient vraie en la convertissant. Il est faux que tout homme soit un animal raisonnable, mortel et grammairien; mais il est vrai que tout animal raisonnable, mortel et grammairien est un homme. Quand une définition n'est vraie ni dans son premier énoncé, ni après sa conversion, elle est plus vicieuse encore que chacune de celles que nous venons d'examiner. Ainsi les deux suivantes: L'homme est un animal blanc; l'homme est un animal quadrupède. Car soit en disant que tout homme est un animal blanc ou quadrupède, soit en convertissant ces deux propositions, tu avances une fausseté. Il y a néanmoins entre elles cette différence que la première s'applique à quelques hommes, puisque beaucoup sont blancs; tandis que la seconde ne s'applique à personne, puisque nul homme n'a quatre pieds.
Assez maintenant, pour t'apprendre à examiner une définition, et à la juger soit en la proposant directement, soit en la renversant : on enseigne là-dessus beaucoup de choses avec autant de paroles que d'obscurités; je tâcherai de te les faire comprendre peu à peu, à mesure que s'en présentera l’occasion.
Edition
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De quantitate animae (PL)
47.
A. Geram tibi morem, et multo libentius retardanti quam festinanti: sed fac totus adsis; valebit enim hoc ad plura quod dicam. Definitio nihil minus, nihil amplius continet, quam id quod susceptum est explicandum; aliter omnino vitiosa est. Utrum autem hujusmodi vitiis careat, conversione exploratur: quod his exemplis tibi fiet apertius. Si enim me rogares quid esset homo, et eum hoc modo definirem, Homo est animal mortale; non continuo quia verum dictum est, etiam definitionem probare deberes, sed superposita ei particula, id est, omnis, convertere illam et intueri, utrum etiam conversa vera esset: hoc est, utrum quemadmodum verum est, omnis homo animal mortale est; ita esset verum, omne animal mortale homo est: quo aliter invento, improbare definitionem propter illud vitium quo aliena comprehendit; non enim solus homo est animal mortale, sed etiam quaevis bestia. Haec igitur hominis definitio perfici solet, cum additur mortali rationale: nam homo est animal mortale rationale; atque ut omnis homo animal rationale mortale est, ita omne animal rationale mortale homo est. Plus continendo ergo superior definitio vitiosa erat, bestiam enim cum homine continebat: ista perfecta est; nam et omnem hominem, et nihil plusquam hominem tenet. Tenendo autem minus, ita vitiosa est si addas grammaticum; quanquam enim omne animal rationale mortale grammaticum homo sit, plures tamen homines, qui grammatici non sunt, hac definitione non continentur: et ob hoc ista per primam illam propositionem falsa est; cum autem convertitur, vera. Falsum est enim, omnis homo animal rationale mortale grammaticum est; sed verum est, omne animal rationale mortale grammaticum homo est. Cum autem neque per primam propositionem, neque per conversionem enuntiata vera est, his singulis est profecto vitiosior: ut sunt istae duae, homo est animal candidum; aut, homo est animal quadrupes. Nam et si dicas, omnis homo animal candidum est; aut animal quadrupes, falsum dicis; et si convertas. Sed hoc inter se differunt, quod illa prima in aliquos homines cadit; nam plerique sunt homines candidi: haec altera in neminem, non enim quisquam homo quadrupes. Haec pro tempore ad explorandas definitiones didiceris, quemadmodum propositione atque conversione judicentur: sunt alia multa de hoc genere quae docentur, et verborum plena et tenebrarum, quae paulatim ubi opportunum videbitur, conabor ut discas.