28.
Donc la raison s'enquiert; elle examine l'émotion sensible de l'âme, qui s'érigeait en juge, et lui demande, quand des intervalles de temps égaux la ravissent, si, entre deux brèves quelconques qu'elle a entendues, il y a une égalité complète, ou s'il est possible d'en allonger une, non jusqu'à la durée totale d'une longue, mais i quelque degré qu'on voudra au-dessous, pourvu qu'elle se prolonge plus longtemps que la brève qui lui est associée. Dira-t-on que c'est possible, quand l'émotion sensible est incapable de saisir ces nuances, et qu'elle s'attache indifféremment aux intervalles égaux ou inégaux? Et qu'y a-t-il de plus honteux que cette méprise et ce défaut d'égalité ? De là une leçon pour nous: c'est d'empêcher notre émotion de s'arrêter aux harmonies qui n'ont qu'un semblant d'égalité, ou dont l'égalité nous échappe. Il arrive même que nous comprenons fort bien qu'elles ne peuvent se ramener à l'égalité, et cependant par cela seul qu'elles en ont l'apparence, nous ne pouvons leur refuser un caractère de beauté dans leur ordre et dans leur espèce.
