21.
Le M. Cependant sache bien que les anciens, trouvant ce mélange légitime, l'ont admis dans leurs vers. Mais je ne veux pas t'imposer leur autorité : écoute donc des vers de ce genre et juge s'ils choquent l'oreille. Si loin de te choquer, ils te font plaisir, tu n'auras plus de raison pour les condamner. Voici les vers que je veux soumettre à ton appréciation
At consona quae sont, nisi vocalibus aptes,
Pars dimidium vocis opus proferet ex se :
Pars muta soni comprimet ors molientum :
Illis sonus obscurior impeditiorque,
Utrumque tamen promitur ore semicluso1.
(Terentianus.)
Cet exemple suffit pour te mettre sur la voie. Ne trouves-tu pas dans ce rythme un nombre qui te flatte l'oreille? — L’E. Assurément tout coule, tout raisonne avec un charme infini. — Le M. Examine de quelle espèce sont les pieds : tu trouveras que, sur ces cinq vers, les deux premiers se composent uniquement d'ioniques, les trois derniers offrent un ditrochée mêlé aux ioniques, et que tous flattent l'oreille par une harmonieuse égalité. — L’E. Je m'en suis aperçu aisément, à la manière surtout dont tu prononçais. — Le M. Pourquoi donc ne pas se ranger sans hésitation à l'opinion des anciens, en se soumettant moins à leur autorité qu'à la raison elle-même, et n'admettre pas avec eux que les pieds qui ont la même durée peuvent se combiner entre eux, pourvu qu'ils aient une mesure régulière, quoique différente? — L’E. Je me rends: l'harmonie des vers que j'ai entendus m'interdit toute objection.
Lorsque les consonnes ne sont pas mêlées avec les voyelles, la moitié du son s'échappe d'elle-même: l'autre moitié ne peut sortir de la bouche, malgré ses efforts et ses grimaces. Les consonnes ont un son plus voilé et plus difficile à émettre : toutefois, voyelles et consonnes se prononcent la bouche à demi-ouverte. ↩
