1.
C'est une importante question que celle du mensonge; elle jette souvent le trouble dans notre conduite habituelle, et nous offre ce double danger: ou de traiter inconsidérément de mensonge ce qui n'est pas mensonge, ou de nous persuader qu'on peut quelquefois mentir pour un motif honorable, pour rendre service ou par pitié. Nous la traiterons donc avec tout le soin possible ; nous nous proposerons les difficultés que l'on soulève; nous n'affirmerons rien au hasard ; et le lecteur attentif saisira, dans le traité même, le résultat de nos recherches, s'il y en a un : car le sujet est obscur, plein, pour ainsi dire, d'anfractuosités et d'antres ténébreux- où souvent la pensée de celui qui le traite s'emprisonne ; au point que l'objet saisi échappe des mains, puis reparaît, pour disparaître encore. A la fin cependant, un examen attentif aboutira à un résultat certain. Que s'il s'y rencontre quelque erreur, comme la vérité délivre de toute erreur; tandis que le faux les entraîne toutes, je me consolerai du moins en pensant que de toutes les erreurs la moins dangereuse est celle que l'on commet par un amour excessif de la -vérité et une haine exagérée du faux. En effet, les censeurs austères disent : Il y a, là, excès; et peut-être la vérité dirait-elle : Il n'y a pas encore assez. En tout cas, lecteur, qui que tu sois, né blâme pas avant d'avoir tout lu, et tu trouveras moins à blâmer: Ne fais point attention au style; car nous nous sommes beaucoup attaché au fond des choses, et nous avons cédé au besoin d'achever promptement un ouvrage si nécessaire pour les besoins quotidiens de la vie: ce qui fait que nous nous sommes peu ou presque pas occupé du choix des expressions.