Edition
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De civitate Dei (CCSL)
Caput XIX: De corruptione Romanae reipublicae, priusquam cultum deorum Christus auferret.
Ecce Romana respublica - quod non ego primus dico, sed auctores eorum, unde haec mercede didicimus, tanto ante dixerunt ante Christi aduentum - paulatim mutata ex pulcherrima atque optima pessima ac flagitiosissima facta est. ecce ante Christi aduentum, post deletam Carthaginem maiorum mores non paulatim, ut antea, sed torrentis modo praecipitati adeo iuuentus luxu atque auaritia corrupta est. legant nobis contra luxum et auaritiam praecepta deorum suorum populo Romano data; cui utinam tantum casta et modesta reticerent, ac non etiam ab illo probrosa et ignominiosa deposcerent, quibus per falsam diuinitatem perniciosam conciliarent auctoritatem. legant nostra et per prophetas et per sanctum euangelium, et per apostolicos actus et per epistulas tam multa contra auaritiam atque luxuriam ubique populis ad hoc congregatis quam excellenter, quam diuine non tamquam ex philosophorum concertationibus strepere, sed tamquam ex oraculis et dei nubibus intonare. et tamen luxu atque auaritia saeuisque ac turpibus moribus ante aduentum Christi rempublicam pessimam ac flagitiosissimam factam non inputant dis suis; adflictionem uero eius, quamcumque isto tempore superbia deliciaeque eorum perpessae fuerint, religioni increpitant Christianae. cuius praecepta de iustis probisque moribus si simul audirent atque curarent reges terrae et omnes populi, principes et omnes iudices terrae, iuuenes et uirgines, seniores cum iunioribus, aetas omnis capax et uterque sexus, et quos baptista Iohannes adloquitur, exactores ipsi atque milites: et terras uitae praesentis ornaret sua felicitate respublica, et uitae aeternae culmen beatissime regnatura conscenderet. sed quia iste audit, ille contemnit, pluresque uitiis male blandientibus quam utili uirtutum asperitati sunt amiciores: tolerare Christi famuli iubentur, siue sint reges siue principes siue iudices, siue milites siue prouinciales, siue diuites siue pauperes, siue liberi siue serui, utriuslibet sexus, etiam pessimam, si ita necesse est, flagitiosissimamque rempublicam et in illa angelorum quadam sanctissima atque augustissima curia caelestique republica, ubi dei uoluntas lex est, clarissimum sibi locum etiam ista conparare tolerantia.
Übersetzung
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La cité de dieu
CHAPITRE XIX.
DE LA CORRUPTION OU ÉTAIT TOMBÉE LA RÉPUBLIQUE ROMAINE AVANT QUE LE CHRIST VÎNT ABOLIR LE CULTE DES DIEUX.
Voilà donc comment la république romaine, « changeant peu à peu, de belle et vertueuse qu’elle était, devint laide et corrompue ». Et ce n’est pas moi qui le dis le premier; leurs auteurs, dont nous l’avons appris pour notre argent, l’ont dit longtemps avant l’avènement du Christ. Voilà comment depuis la ruine de Carthage, « les antiques moeurs, au lieu de s’altérer insensiblement , s’écoulèrent comme un torrent : tant le luxe et la cupidité avaient corrompu la jeunesse ! »Où sont les préceptes donnés au peuple romain par ses dieux contre le luxe et la cupidité? et plût au ciel qu’ils se fussent contentés de se taire sur la chasteté et la modestie, au lieu d’exiger des pratiques indécentes et honteuses auxquelles ils donnaient une autorité pernicieuse par leur fausse divinité ! Qu’on lise nos Ecritures, on y verra cette multitude de préceptes sublimes et divins contre l’avarice et l’impureté, partout répandus dans les Prophètes, dit le saint Evangile, dans les Actes et les Epîtres des Apôtres, et qui font éclater à l’oreille des peuples assemblés non pas le vain bruit des disputes philosophiques, mais le tonnerre des divins oracles roulant dans les nuées du ciel. Les païens n’ont garde d’imputer à leurs dieux le luxe, la cupidité, les moeurs cruelles et dissolues qui avaient si profondément corrompu la république avant la venue de Jésus-Christ; et ils osent reprocher à la religion chrétienne toutes les afflictions que leur orgueil et leurs débauches attirent aujourd’hui sur elle. Et pourtant, si les rois et les peuples, si tous les princes et les juges de la terre, si les jeunes hommes et les jeunes filles, les vieillards et les enfants, tous les âges, tous les sexes, sans oublier ceux à qui s’adresse saint Jean-Baptiste1, publicains et soldats, avaient soin d’écouter et d’observer les préceptes de la vie chrétienne, la république serait ici-bas éclatante de prospérité et s’élèverait sans effort au comble de la félicité promise dans le royaume éternel; mais l’un écoute et l’autre méprise, et comme il s’en trouve plus qui préfèrent la douceur mortelle des vices à l’amertume salutaire des vertus2, il faut bien que les serviteurs de Jésus-Christ, quelle que soit leur condition, rois, princes, juges, soldats, provinciaux, riches et pauvres, libres ou esclaves de l’un ou de l’autre sexé, supportent cette république terrestre, fût-elle avilie, fût-elle au dernier degré de la corruption, pour mériter par leur patience un rang glorieux dans la sainte et auguste cour des anges, dans cette république céleste où la volonté de Dieu est l’unique loi.