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De civitate Dei (CCSL)
Caput XI: De simulacro Cumani Apollinis, cuius fletus creditus est cladem Graecorum, quibus opitulari non poterat, indicasse.
Neque enim aliunde Apollo ille Cumanus, cum aduersus Achiuos regemque Aristonicum bellaretur, quatriduo fleuisse nuntiatus est; quo prodigio haruspices territi cum id simulacrum in mare putauissent esse proiciendum, Cumani senes intercesserunt atque rettulerunt tale prodigium et Antiochi et Persis bello in eodem apparuisse figmento, et quia Romanis feliciter prouenisset, ex senatus consulto eidem Apollini suo dona missa esse testati sunt. tunc uelut peritiores acciti haruspices responderunt simulacri Apollinis fletum ideo prosperum esse Romanis, quoniam Cumana colonia Graeca esset, suisque terris, unde accitus esset, id est ipsi Graeciae, luctum et cladem Apollinem significasse plorantem. deinde mox regem Aristonicum uictum et captum esse nuntiatum est, quem uinci utique Apollo nolebat et dolebat et hoc sui lapidis etiam lacrimis indicabat. unde non usquequaque incongrue quamuis fabulosis, tamen ueritati similibus mores daemonum describuntur carminibus poetarum. nam Camillam Diana doluit apud Vergilium et Pallantem moriturum Hercules fleuit. hinc fortassis et Numa Pompilius pace abundans, sed quo donante nesciens nec requirens, cum cogitaret otiosus, quibusnam dis tuendam Romanam salutem regnumque committeret, nec uerum illum atque omnipotentem summum deum curare opinaretur ista terrena, atque recoleret Troianos deos, quos Aeneas aduexerat, neque Troianum neque Lauiniense ab ipso Aenea conditum regnum diu conseruare potuisse: alios prouidendos existimauit, quos illis prioribus, qui siue cum Romulo iam Romam transierant, siue quandoque Alba euersa fuerant transituri, uel tamquam fugitiuis custodes adhiberet uel tamquam inualidis adiutores.
Traduction
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La cité de dieu
CHAPITRE XI.
DE LA STATUE D’APOLLON DE CUMES, DONT ON PRÉTEND QUE LES LARMES PRÉSAGÈRENT LA DÉFAITE DES GRECS QUE LE DIEU NE POUVAIT SECOURIR.
Il n’y a d’autre raison que cette impuissance des dieux pour expliquer les larmes que versa pendant quatre jours Apollon de Cumes, au temps de la guerre contre les Achéens et le roi Aristonicus a1 Les aruspices effrayés furent d’avis qu’on jetât la statue dans la mer; mais les vieillards de Cumes s’y opposèrent, disant que le même prodige avait éclaté pendant les guerres contre Antiochus et contre Persée, et que, la fortune ayant été favorable aux Romains, il avait été décrété par sénatus-consulte que des présents seraient envoyés à Apollon. Alors on fit venir d’autres aruspices plus habiles, qui déclarèrent que les larmes d’Apollon étaient de bon augure pour les Romains, parce que, Cumes étant une colonie grecque, ces larmes présageaient malheur au pays d’où elle tirait son origine. Peu de temps après on annonça que le roi Aristonicus avait été vaincu et pris : catastrophe évidemment contraire à la volonté d’Apollon, puisqu’il la déplorait d’avance et en marquait son déplaisir par les larmes de sa statue. On voit par là que les récits des poètes, tout fabuleux qu’ils sont, nous donnent des moeurs du démon une image qui ressemble assez à la vérité. Ainsi, dans Virgile, Diane plaint Camille2, et Hercule pleure la mort prochaine de Pallas3. C’est peut-être aussi pour cette raison que Numa, qui jouissait d’une paix profonde, mais sans savoir de qui il la tenait et sans se mettre en peine de le savoir, s’étant demandé dans son loisir à quels dieux il confierait le salut de Rome, Numa, dis-je, dans l’ignorance où il était du Dieu véritable et tout-puissant qui tient le gouvernement du monde, et se souvenant d’ailleurs que les dieux des Troyens apportés par Énée n’avaient pas longtemps conservé le royaume de Troie, ni celui de Lavinium qu’Énée lui-même avait fondé, Numa crut devoir ajouter d’autres dieux à ceux qui avaient déjà passé à Rome avec Romulus, comme on donne des gardes aux fugitifs et des aides aux impuissants.
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La guerre dont il s’agit ici est évidemment celle qui fut suscitée par la succession d’Attale, roi de Pergame, succession que son neveu Aristonicus disputait aux Romains. (Voyez Tite-Live, lib. LIX;) C’est par inadvertance que saint Augustin nomme les Achéens, qui étaient alors entièrement vaincus et soumis. ↩
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Enéide, liv. XI, vers 836-849. ↩
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Enéide liv. X vers 464 465. ↩