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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430) De utilitate credendi De l'utilité de la foi

13.

Mon cher. Honorat, j'en atteste ma conscience et le Dieu qui habite dans les âmes pures, rien n'est plus, sage selon moi, plus chaste et plus religieux que toutes ces Ecritures que l'Eglise catholique conserve sous le nom d'Ancien Testament. Cela t'étonne, je le comprends. Car je ne puis dissimuler que nous en avons jugé d'une manière bien différente. Mais il n'y a certainement rien de plus téméraire, ce qui était le défaut de notre première jeunesse, que d'abandonner les interprètes de tous ces livres, interprètes qui sont à même de les bien connaître et de les expliquer à leurs disciples, pour aller en demander té sens à des hommes qui, poussés par je ne sais quel motif, tint déclaré une guerre acharnée à ceux qui en sont les écrivains et les auteurs. Qui jamais a cru que les ouvrages où Aristote traite de matières abstraites et obscures, dussent être expliqués par un ennemi de ce philosophe, pour parler de sciences dans lesquelles le lecteur peut faillir sans impiété? Qui enfin a songé à lire ou à étudier sous la direction d'Epicure le traité de géométrie d'Archimède, traité contre lequel ce philosophe dissertait avec beaucoup d'opiniâtreté, sans y rien comprendre, autant que je puis croire? Mais sont-ils si faciles à entendre, ces traités de la Loi sur lesquels les Manichéens se jettent bien en vain, comme s'ils étaient accessibles au vulgaire ? Ils ressemblent pour moi à une certaine femme dont eux-mêmes se moquent : impatientée de voir une Manichéenne lui vanter le soleil et lui en recommander le culte, cette femme, toute naïve dans sa religion, se leva avec emportement, et frappant du pied à plusieurs reprises, l'endroit où se projetaient à travers la fenêtre les rayons du soleil, elle s'écria : Voilà comme je foule aux pieds ton soleil et ton dieu. Trait tout à fait ridicule et d'une vraie femme, qui le nie? Mais ne te semblent-ils pas en faire autant ceux qui, attaquant avec violence des doctrines qu'ils ne comprennent pas, dont ils ne savent ni la raison ni le sens exact, doctrines vulgaires en apparence, mais profondes et divines pour ceux qui les entendent, déversent sur elles l'injure, et s'imaginent avoir fait merveille parce qu'ils sont applaudis des ignorants ? Crois-moi, tout ce qu'il y a dans ces Ecritures est élevé et divin; on y trouve la vérité absolue, et la science la plus propre à nourrir l'âme et à réparer ses forces; et cette science est si bien mise à notre portée, qu'il n'y a personne qui n'en puisse tirer ce qui lui est nécessaire, pourvu qu'il s'en approche, pour y puiser avec la dévotion et la piété que la vraie religion demande.

Pour te le prouver, de nombreuses raisons longuement développées sont nécessaires. Je dois d'abord t'engager à ne pas avoir d'aversion pour les auteurs mêmes de ces livres, et ensuite à les aimer; et je dois pour cela employer tout autre moyen que l'exposition de leurs maximes et de leurs écrits. Si nous détestions Virgile, ou plutôt si, avant de 1e comprendre, l'estime que nos pères ont eue pour lui, ne nous le faisait pas aimer ; jamais nous ne trouverions de solution satisfaisante à ces innombrables questions qui agitent et troublent les savants. Nous aurions peine à écouter celui qui voudrait les résoudre à l'honneur de l'écrivain; notre sympathie serait pour ceux qui chercheraient à faire voir par là que Virgile est tombé dans l'erreur et l'absurdité. Mais aujourd'hui, des nombreux commentateurs qui, chacun selon sa capacité, cherchent à élucider ces questions, les plus applaudis sont ceux dont les explications nous font trouver le poète meilleur; et ce poète passe, même aux yeux de ceux qui ne le comprennent pas, non-seulement pour un écrivain irréprochable, mais encore pour n'avoir rien écrit qui ne soit digne d'éloge. Aussi, que sur la moindre question le maître reste court et n'ait rien à répondre, nous lui en voulons plutôt que d'attribuer son embarras à Virgile. S'il allègue pour sa défense que ce grand écrivain s'est trompé, ses disciples auront peine à rester près de lui, lui eussent-ils déjà payé ses leçons.

Que nous étions loin d'avoir ces dispositions bienveillantes pour ceux à qui tant de siècles ont rendu ce témoignage, que le Saint-Esprit avait parlé par leur bouche ! Mais, jeunes prodiges d'intelligence que nous étions, merveilleux appréciateurs de raisons, sans même parcourir ces ouvrages, sans chercher des maîtres, sans accuser en quoi que ce soit notre pesanteur d'esprit, sans montrer enfin la moindre déférence pour ceux qui ont voulu que ces ouvrages fussent dans tout l'univers, pendant si longtemps, lus , gardés, étudiés ; nous n'avons rien vu chez eux qui méritât d'être cru ; tandis que leurs ennemis acharnés nous séduisaient par leurs violences de langage, et, en promettant faussement de satisfaire notre raison, nous faisaient croire et respecter mille fables de leur invention.

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