8.
Quiconque voudrait se rendre compte de ces mystères de la nature, on pourrait lui appliquer cette parole : «Ne cherchez pas ce qui est au-dessus de vous, et ne scrutez pas ce qui est plus fort que vous ». Il s'agit ici, non point de ce qui ne saurait être touché par notre corps, mais de ce que notre intelligence ne saurait comprendre, et de ce que, la puissance de l'esprit ne saurait pénétrer. Et cependant je ne parle ni du ciel, ni de la dimension des astres, ni de l'étendue de la mer et des terres, ni des profondeurs de l'enfer; nous sommes, et nous ne pouvons nous comprendre; toute notre science doit avouer son impuissance et son infériorité par rapport à nous; nous ne pouvons nous comprendre, et cependant nous ne sommes pas en dehors de nous-mêmes. Toutefois nous ne sommes pas à comparer aux animaux, quoique nous ne sachions pas ce que nous sommes; et cependant vous pensez que l'on doit nous assimiler aux animaux, si nous avons oublié ce que nous avons été; mais, pour l'avoir oublié, ne faudrait-il pas l'avoir su? Dans le moment où je parle, ni mon âme ne m'est transmise par mes parents, ni elle ne m'est soufflée par Dieu ; quelque soit le mode que Dieu ait employé pour me la donner, il ne l'a employé qu'au moment même de ma création; aujourd'hui il ne crée rien de moi ni en moi; ma création est un fait passé, complètement écoulé. Je ne sais pas même si j'ai eu connaissance de ce fait, et si je l'ai oublié ; je ne puis même pas sentir et savoir quand il s'est accompli.