XIV.
Leur crime est si grand que, s’ils mouraient en confessant la foi, leur sang ne suffirait pas à le laver. La discorde anéantit toute charité; (129) rien ne peut l’expier, pas même le martyre. Peut-il y avoir des martyrs hors de l’Église? Peut-on arriver au royaume céleste, quand on abandonne celle en qui nous devons régner? Le Christ nous a donné la paix; il nous a recommandé la concorde et l’union; il nous a prescrit de conserver dans leur intégrité les liens de la charité et de l’amour il ne peut donc se dire martyr celui qui ne persévère pas dans la charité fraternelle. C’est aussi la doctrine de l’apôtre saint Paul: Quand ma foi serait capable de transporter les montagnes, si je n’ai pas la charité, je ne suis rien. Quand je distribuerais tous mes biens aux pauvres, quand je livrerais mon corps aux flammes, si je n’ai pas la charité, je ne gagne rien. La charité est magnanime, bienveillante, sans jalousie, sans pensée amère; elle ne s’enfle pas, ne s’irrite pas, ne pense pas le mal; elle aime tout, croit tout, espère tout, supporte tout. La charité ne périt pas (I Corint., XIII). Vous l’entendez, mes bien-aimés, la charité ne périt pas; elle vivra dans le royaume céleste; elle sera le lien éternel et indissoluble des élus. Mais, pour la discorde, elle sera à tout jamais frappée d’exclusion.
Le Christ a dit : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés moi-même. Il a promis une récompense à ceux qui observeraient ce précepte : comment mériterait-il la récompense celui qui, par des dissensions perfides, anéantit la charité du Christ? Celui qui n’a pas la charité ne possède pas Dieu, dit l’apôtre saint Jean, car Dieu est amour; celui qui persévère dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu en lui (I Joan., IV.). Les déserteurs de l’Église de Dieu rie peuvent demeurer en Dieu. Qu’ils périssent dans les flammes, qu’ils meurent sous la dent des bêtes, ce n’est pas un-titre à la récompense, mais le châtiment de leur perfidie; ce n’est pas la fin glorieuse d’une vie chrétienne , mais le dernier acte d’un aveugle désespoir. Ils (131) peuvent recevoir la mort, mais non pas la couronne. Ils se disent chrétiens, comme le démon se dit le Christ, selon cet avertissement du Maître : Plusieurs viendront en mon nom, disant : Je suis le Christ; et ils séduiront la multitude (Marc., XIII.). De même que le démon n’est pas le Christ, quoiqu’il se serve de son nom pour séduire, ainsi l’homme qui ne persévère pas dans la vérité (le l’Évangile et de la foi ne peut se dire chrétien.
