1.
Ceux qui doivent combattre sur la mer ont auparavant coutume, lorsqu'ils sont encore dans le port et dans le calme, de hausser et de baisser le gouvernail, de se servir des rames, de préparer les mains de fer destinées à accrocher les vaisseaux ennemis, et de mettre leur soldats en ordre le long des bancs pour le apprendre à demeurer fermes dans un champ de bataille aussi glissant qu'est celui d'un vaisseau agité des flots, afin que, s'étant exercés de la sorte dans ces combats qui ne sont que feints, ils n'aient point d'appréhension ni de crainte lorsqu'ils se trouveront dans des combats véritables : ainsi, après avoir demeuré longtemps dans le silence que m'a fait garder celui qui ne peut souffrir que je parle, je veux m'exercer dans un petit ouvrage et comme dérouiller ma langue, afin de pouvoir entreprendre une histoire plus étendue; car j'ai résolu d'écrire ( si Dieu me conserve la vie, et si ceux qui me déchirent par Jours médisances cessent de me persécuter au moins maintenant qu'ils voient que je m'enfuis et que je me cache) comment et par qui, depuis l'avènement de notre. Sauveur jusqu'à notre siècle, c'est-à-dire depuis les apôtres jusqu'au temps où nous vivons, l'Eglise de Jésus-Christ s'est établie, s'est fortifiée, s'est accrue par les persécutions et a été couronnée par le martyre ; et comment, depuis que les empereurs ont embrassé sa créance, ses vertus se sont diminuées par l'augmentation de son autorité et de ses richesses ; mais ce n'est pas ici le lieu de traiter cette matière, et il faut venir au sujet que j'ai entrepris.