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CHAPITRE V. L'ASCÈSE INTIME
I. — Orgueil et vaine gloire.

Du bienheureux Antoine :

S'il pouvait se faire, le moine devrait déclarer aux anciens et le nombre de ses pas et le nombre des verres d'eau qu'il boit dans sa cellule. (Ruffin, 176. P. L., 73, 199.)

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Lorsque j'étais encore enfant, nous dit l'abbé Sérapion, et que je demeurais encore avec l'abbé Théonas, le démon m'avait engagé par ses artifices dans cette mortelle accoutumance, qu'après avoir pris mon repas avec ce vénérable abbé après l'office de none, je dérobais tous les jours un petit pain que je mangeais le soir en cachette. Quoique je fisse ce larcin volontairement, et que satisfaisant ainsi ma sensualité je me confirmasse de plus en plus dans cette habitude d'incontinence, cela n'empêchait pas néanmoins qu'après cette satisfaction passagère, revenant à moi, je ne fusse sans comparaison plus tourmenté du mal que j'avais fait en dérobant ce pain, que je n'avais eu de plaisir en le mangeant. Je gémissais ainsi avec douleur sous la tyrannie du démon qui m'imposait cet ouvrage d'intempérance, comme autrefois les cruels exacteurs de Pharaon imposaient les travaux de terre et de briques au peuple de Dieu; et ne pouvant me délivrer de cette malheureuse nécessité, je rougissais de découvrir mon larcin à ce saint vieillard. Mais il arriva, un jour, par une conduite toute particulière de Dieu qui me voulait tirer de cette longue servitude, que quelques solitaires vinrent dans la cellule de mon abbé dans le désir de s'édifier de ses instructions.

Lorsqu'après être sorti de table, on commença de s'entretenir de quelques discours de piété, et que le saint vieillard répondait à toutes les questions qu'on lui faisait, il tomba insensiblement sur la gourmandise, et dit d'étranges choses de ce vice. Il parla aussi avec étendue de l'empire qu'avaient sur nous les mauvaises pensées lorsque nous les tenions secrètes, et représenta vivement la violence qu'elles exerçaient sur nous, tant que nous les tenions dans le silence.

Ce discours si animé fut pour moi comme une flèche de feu qui me pénétra, et le remords de ma conscience qui se joignait à la véhémence de ses paroles, me faisant croire que ce n'était que pour moi qu'il parlait de la sorte, et que sans doute Dieu lui avait découvert le secret de mon coeur, je me laissai d'abord aller aux soupirs, que j'étouffais dans moi-même le mieux que je pouvais. Mais la douleur et la componction s'augmentant, elle se répandit au dehors par des sanglots et des larmes excessives. Je tirais de mon sein qui avait tant de fois recélé ce larcin infâme, le petit pain que selon ma coutume ordinaire j'avais dérobé pour le manger le soir; je le fis voir à ces saints solitaires; je leur déclarai comment j'en mangeais tous les jours autant en cachette; je me jetai par terre, je demandai pardon, je répandis une grande abondance de larmes et conjurai ces témoins de mon crime de prier Dieu pour moi, et lui demander qu'il me délivrât de cette dure captivité dans laquelle je gémissais depuis tant de temps.

Mon vénérable abbé me voyant en cet état, me dit : « Courage, mon fils, ayez confiance en Dieu. Vous n'avez pas besoin de mes paroles. La confession que vous venez de faire de votre faute, vous a déjà délivré de cette longue servitude dont vous gémissiez. Vous avez triomphé aujourd'hui de cet ennemi qui vous tenait assujetti depuis tant de temps. »

A peine ce sage vieillard eut achevé de par-ler, qu'une lampe allumée sortit de mon sein, qui remplit tellement la cellule où nous étions d'une odeur de soufre, que sa puanteur insupportable nous permit à peine d'y demeurer davantage. Ce saint vieillard reprenant la parole : « Mon fils, me dit-il, vous voyez de vos yeux la vérité de ce que je viens de vous dire, et que votre humble confession a chassé visiblement de votre coeur votre ennemi. »

La confession que je fis alors de cette faute, arrêta tellement la domination que le diable exerçait sur moi, qu'il n'a pas même tenté depuis de m'en rappeler la mémoire; et je n'ai jamais depuis ce temps senti le moindre désir d'un larcin semblable. (Coll., II, 11. P. L., 49, 538.)

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Il y avait un frère qui était tenté de blasphémer. Lorsqu'il entendait parler d'anciens de mérite, il allait à eux dans le dessein de s'ouvrir, mais quand il était en leur présence la honte le retenait. Ainsi Poemen reçut plusieurs fois sa visite. Le saint vieillard voyait bien que le frère était tourmenté par des tentations et il s'affligeait de ce qu'il ne parlait pas. Aussi le prenant un jour avec lui : « Voilà déjà longtemps, lui dit-il, que tu viens ici pour me faire connaître tes pensées, et une fois arrivé, tu n'oses pas parler et tu t'en retournes avec elles, inquiet comme tu es venu. Dis-moi donc de quoi il s'agit. » — Il répondit : « Le démon me pousse à blasphémer et m'élever contre Dieu, et j'ai honte de le dire. » Ayant ainsi dit la chose, il se sentit soulagé. « Mon fils, lui dit alors le vieillard, ne te mets pas en peine, mais quand ces idées se présentent dis seulement : Je ne suis pour rien en cela, que ton blasphème retombe sur toi, Satan! Mon âme ne veut pas de ce péché, et ce à quoi l'âme ne consent pas ne fait que passer. » Et le frère s'en alla ayant reçu le remède à son mal. (Apoph., Poemen, 93. P. G., 65,343.)

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Ne vous laissez pas tromper par le démon de la vanité vous qui êtes le fils obéissant du Seigneur, et ne racontez pas vos propres péchés à votre supérieur sous la personne d'un autre. Car on ne saurait se délivrer de la confusion éternelle sans la confusion temporelle. Découvrez à nu votre mal et votre blessure au médecin spirituel. Dites-lui sans honte : « Mon Père, cette faute est toute de moi, cette plaie est ma propre plaie. Elle ne m'est venue que de ma seule négligence, et je ne puis l'attribuer à un autre. C'est moi-même qui me l'ai causée, et je ne m'en dois prendre ni aux suggestions des hommes, ni à la malice des démons, ni à la fragilité de mon corps, ni à quelque créature que ce soit, mais à ma lâcheté et à ma paresse. »

Lorsque vous confessez vos fautes, prenez les gestes, le visage et l'esprit d'un criminel. Tenez les yeux baissés vers la terre, et arrosez de vos larmes, s'il est possible, les pieds de votre juge et de votre médecin, comme ceux de Jésus-Christ même.

La coutume ordinaire des démons est de nous porter ou à ne point confesser nos péchés, ou à le faire sous la personne d'un autre, ou à rejeter notre propre faute sur quelqu'un, comme en ayant été la cause. (Clim., VI, 61, 62, 63. P. G., 88, 70, 8.)

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Ne dédaignez pas de faire avec un esprit et une contenance humble et modeste, la confession de vos péchés à celui qui vous aide pour en guérir, comme vous la feriez à Dieu même. Car j'ai vu des criminels qui par une triste et humble contenance, et par une confession et des prières encore plus humbles et plus ferventes, ont fléchi et adouci la rigueur de leur juge qui semblait inexorable, et l'ont fait passer de la sévérité et de la colère à la miséricorde et à la compassion. C'était pour cette raison que saint Jean, précurseur de Jésus-Christ, obligeait ceux qui venaient vers lui à confesser leurs péchés avant qu'il les baptisât, ne recherchant pas cette confession par le besoin qu'il en eût pour soi, mais travaillant pour leur bien et pour leur salut. (Clim., IV, 66. P. G., 88, 708.)

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