L'âme dégagée des liens du corps.
Ceux qui sont arrivés à ce degré d'amour qui les rend égaux aux anges, oublient souvent de prendre la nourriture qui est nécessaire à leur corps et je pense même que d'ordinaire ils n'ont point le désir du manger qui est si naturel à tous les hommes. Et certes, on ne doit pas le trouver étrange, puisque nous voyons souvent que même les gens du monde ne pensent point à manger lorsque quelque désir plus violent les possède.
Je crois encore que les corps de ces personnes qui sont devenues comme incorruptibles ne sont pas si sujets que les autres aux maladies ; parce qu'ayant été purifiés par cette flamme toute pure de l'amour divin qui a éteint celle de la concupiscence, ils ne sont plus sujets à aucune corruption. Et je crois aussi que lorsqu'ils mangent, ils n'y peuvent prendre aucun goût ni aucun plaisir. Car l'eau qui est dans la terre ne nourrit pas plus une plante en humectant ses racines, que ce feu du ciel nourrit ces âmes en les consumant. (Clim., XXX, 18, 19. P. G., 88, 1158.)
*
- *
L'abbé Poemen disait : Nous lisons dans les psaumes que le cerf ne désire pas avec plus d'ardeur de désaltérer sa soif dans une fontaine, que notre âme désire de goûter les délices de son Dieu. Or comme les cerfs après avoir mangé des serpents dans le désert, et que leur venin s'est répandu dans tout leur corps se sentent embrasés d'une telle ardeur, qu'ils cherchent partout des fontaines pour l'éteindre, de même les solitaires étant embrasés dans la solitude par l'ardeur du venin des malins esprits, désirent de rencontrer au jour du dimanche de claires fontaines, c'est-à-dire le corps et le sang de Notre-Seigneur Jésus-Christ, pour être purifiés de l'infection d'un poison si redoutable. (Pélage., XVIII, 17. P. L., 73, 983)1.
-
Cfr. Clim., XXX, 14. P. G., 88, 1156. ↩