Chapitre CVIII.
Quand on lut cette lettre devant l'empereur, on sut que nous étions encore en butte, dans ce moment, à la fureur des méchants du Midi ; que nous étions tourmentés et tout près de notre perte ; que le bon et illustre roi Sempad était sorti de la vie, et qu'il avait reçu la tunique des martyrs. Alors on pensa à nous protéger efficacement. En conséquence on envoya promptement1 au prince royal Aschod, d'après ma demande, un certain Théodore (Théotoros), délégué impérial porteur de nombreux et magnifiques présents, d'un traité d'alliance et d'amitié, et chargé enfin de renouer les liens qui avaient subsisté entre Basile (Pasil), père de l’empereur, et Sempad, père du roi. Il s'empressa de se mettre en route pour aller voir le prince et pour arranger toutes les choses Nécessaires, parce que le fils du roi, Aschod, était retiré et caché dans les forts dépendants de sa souveraineté. Comme j'étais alors dans la province de Daron, le délégué impérial vint d'abord me trouver ; moi, par une espèce d'inspiration, j'allai au-devant de lui. Je le reçus, et je l'envoyai au fils du roi, Aschod. Quand il fut arrivé auprès de ce prince, il lui montra l'ordre impérial ; Aschod fut ranimé par l'amitié et les bonnes dispositions (que lui témoignait cet écrit). Il se mit immédiatement en route pour se rendre auprès du grand empereur, et il fit rapidement son voyage ; partout où il s'arrêta pour prendre quelque repos, il trouva la plus parfaite hospitalité et des honneurs tout à fait royaux, Parvenu à sa destination, il fut reçu avec la plus haute distinction et la plus grande magnificence. On lui rendit bien plus d'honneurs qu'à tous les plus grands princes ; on le traita, non comme les autres hommes distingués mais comme le rejeton des rois, et presque avec autant de magnificence que s'il s'était agi de l'empereur lui-même ; on lui présenta toutes sortes d'ornements royaux, et on le combla de distinctions royales. En même temps l'empereur l'appelait fils de martyr et son cher enfant ; il le fit revêtir de pourpre, lui donna des robes magnifiques enrichies d’or, et des ornements dorés, et le ceignit de ceintures enrichies de pierreries. Ce ne fut pas une fois ou deux, mais à plusieurs reprises ; il lui faisait aussi monter des chevaux rapides, couverts de riches et superbes caparaçons. Enfin Aschod reçut en présent une grande quantité de coupes et de vases, et beaucoup d'ustensiles d'or et d'argent. Tous les nakharars qui étaient venus à sa suite furent également comblés de marques d'honneur ; on leur compta de fortes sommée d'argent, et on leur assigna un traitement considérable, qui devait durer jusqu'au moment où ils repartiraient.
L'arrivée d'un envoyé impérial auprès du roi Aschod et le voyage de ce prince à Constantinople se placent en 921. (Voyez Saint-Martin, Mém. I, 361.) Le récit de Jean Catholicos doit être modifié par suite de la remarque qui termine la note précédente et la note relative aux chapitres C et CI. ↩
