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Que dites-vous; ô Paul? Comment est-il vrai que nous n'ayons plus d'espérance que pour cette vie, sans-la résurrection des corps, puisque l'âme demeure immortelle? C'est que, quelle que soit la persistance de l'âme immortelle, eût-elle mille fois l’immortalité, comme elle la possède en fait, sans la chair elle: ne recevra- pas ces biens ineffables, de même qu'elle ne subira pas les châtiments. « Car toutes choses seront manifestées devant le tribunal du Christ, afin que chacun reçoive ce qui est dû aux bonnes ou aux mauvaises actions qu'il aura faites pendant qu'il aura été revêtu de son corps. » ( II Cor. V, 10). Voilà pourquoi l'apôtre dit : « Si nous n'avions d'espérance en Jésus-Christ que pour cette vie, nous serions les plus misérables de tous les hommes ». En effet, si le corps ne ressuscite pas, l'âme demeure sans couronne, en dehors de la félicité des cieux ; s'il en est ainsi, alors nous n'obtiendrons absolument rien ; si rions ne devons rien obtenir alors, C'est dans la vie présente qu'ont lieu les rémunérations. Qu'y aurait-il donc, dit-il, de plus infortuné que nous? Or, par de tels discours, l'apôtre voulait à la foi;; raffermir la doctrine de la résurrection des corps et persuader l'immortalité de l'âme, afin qu'on n'allât pal. s'imaginer que tout est détruit, que tout cesse dans le moment présent. Après avoir, par ce qui précède, suffisamment raffermi ce qu'il voulait consolider, après avoir dit : « Si les morts ne ressuscitent point, Jésus-Christ, non plus, n'est pas ressuscité ; or, si Jésus-Christ n'est pas ressuscité », nous sommes perdus, et encore, nous sommes encore dans les péchés, il introduit de plus la pensée qui suit, afin de secouer fortement les âmes. Car lorsque l'apôtre se prépare à énoncer un des dogmes qui sont nécessaires, c'est par la terreur qu'il commence à attaquer les coeurs durs,: c'est la pratique qu'il suit, en ce moment, après avoir jeté la confusion, inspiré des inquiétudes, montré que tout serait perdu, il reprend le même sujet sur un autre ton, et, pour produire, la consternation, « nous serions», dit-il, « les plus misérables de tous les hommes », si, après tant de guerres et de morts, et de maux innombrables, nous devions être privés de tant de biens, si tout se réduisait. pour nous à la vie présente : car tout dépend de la résurrection. Aussi est-ce là une nouvelle preuve qu'il ne parlait pas de péchés, niais de la résurrection des corps, et de la vie présente, et de la vie à venir.
« Mais maintenant Jésus-Christ est ressuscité d'entre les morts, et il est devenu les prémices de ceux qui dorment (20) ». Après avoir montré tous les. maux qui résultent de ce que l'on ne croit pas à la résurrection, il reprend de nouveau ce qui a été dit, et il fait entendre ces paroles : « Mais maintenant Jésus-Christ est ressuscité d'entre les morts » ; il ajoute tout de suite, «d'entre les morts », pour fermer la bouche aux hérétiques. « Les prémices de ceux qui donnent ». S'il est les prémices, nécessairement ceux-là aussi doivent ressusciter. S'il entendait par résurrection (570) l'affranchissement du péché, comme personne n'est sans péché [car Paul dit « car encore que ma conscience ne me reproche rien, je ne suis pas justifié pour cela » (I. Cor. IV, ,4)]; comment donc pourrait-il y avoir une résurrection selon vous? Voyez-vous que c'est des corps qu'il prétend parler? Et pour confirmer ce point, tout de suite il montre le Christ ressuscité dans sa chair. Ensuite il donne la cause. Car, je l'ai déjà dit, l'affirmation d'un fait, quand la cause ne s'y joint pas, n'obtient pas autant l'adhésion du grand nombre. Quelle est donc la cause? « Ainsi parce que la mort est venue par un homme, la résurrection des morts doit venir aussi par un homme (21) ». Il est clair que si c'est paf un homme, c'est par un homme qui a un corps. Ce n'est pas tout voyez encore l'habileté d'un raisonnement qui établit encore autrement la nécessité de la déduction. Celui qui a été vaincu, doit nécessairement réparer sa défaite lui-même, relever la nature terrassée, vaincre lui-même, c'est ainsi . qu'il lavera sa honte. Voyons de quelle morfil parle. « Car de même que tous meurent en Adam, tous vivront aussi en Jésus-Christ. (22) ». Quoi donc? est-ce bien tous, répondez-moi, je vous en prie, qui sont morts dans Adam de la mort du péché? comment donc Noé était-il juste dans sa génération? et Abraham? à Job? et tous les autres? Et maintenant, dites-moi, je vous. en prie, est-ce que, tous seront vivifiés en Jésus-Christ? Et où sont ceux qui sont emportés dans la géhenne ? Car si c'est du corps que l'on parle, le discours subsiste, mais s'il est question de la justice et du péché, il n'en est plus de même. L'apôtre donc ne voulant pas que cette vivification de tous soit regardée comme le salut des pécheurs, ajoute, « et chacun en son rang (23) », vous avez entendu parler de résurrection, mais n'allez pas croire que tous obtiennent les .mêmes biens, et jouissent des mêmes récompenses. Car s'il est vrai que, dans le supplice, tous ne supporteront pas la même peine, s'il est vrai que la différence sera grande, à bien plus forte raison, entre les pécheurs et les justes il y aura une plus grande distancé. « Jésus-Christ, le premier, comme les prémices de tous ; puis ceux qui sont à Jésus-Christ »; c'est-à-dire, les fidèles et ceux qui sont justement estimés. « Ensuite ..la consommation (24). » Car quand ceux-là seront ressuscités, toutes choses recevront leur accomplissement : ce n'est pas comme maintenant, après la résurrection du Christ, que toutes choses sont encore. en suspens. Et pour cette. raison, l'apôtre ajoute, « à, son avènement », afin que vous compreniez que c'est de ce temps-là qu'il parle. « Lorsqu'il aura remis son royaume à Dieu son Père, et qu'il aura détruit tout empire, toute domination et toute puissance. (24) » .
