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Voici maintenant, pour combattre la forte impression que je te vois éprouver, non ce que je trouve de plus décisif et de plus puissant, mais ce que je préfère, parmi beaucoup d'autres raisons, comme plus court et mieux approprié à ton esprit. — Ev. Dis-le , je t'en prie, aussi vite que possible. — Aug.. Premièrement, si ces phénomènes se produisent dans quelques corps vivants lorsqu'on les coupe, nous ne devons pas nous troubler pour ce seul motif ni croire fausses tant d'observations que tu viens de voir plus claires que le jour. Il peut se faire effectivement que nous ignorions la cause de ce qui nous étonne, soit parce qu'elle est cachée à la nature humaine, soit parce qu'elle est connue d'un homme que nous ne saurions interroger, soit enfin parce que nous avons un genre d'esprit qui ne lui permet point de nous satisfaire. Faut-il donc sacrifier pour cela et nous laisser ravir ce que nous connaissons en sens contraire avec tant de certitude, ce dont nous proclamons l'exacte vérité? Si l'objection ne détruit aucune des réponses que tu as faites à mes questions, et dont tu as reconnu l'indubitable justesse.; pourquoi craindrions-nous comme des enfants ce misérable vermisseau, dont nous ne saurions expliquer la vie, quand on l'amis en pièces?
Tu as, je suppose , la ferme assurance que tel homme est un homme de bien ; tu le rencontres attablé avec des larrons que tu poursuis, et il meurt avant que tu aies pu le questionner : lors même que tu ignorerais éternellement pourquoi il se trouvait au milieu des brigands et à table avec eux, tu préférerais supposer n'importe quel motif, plutôt que de le croire coupable et associé à ces scélérats. Et quand les raisons nombreuses qui viennent d'être développées et dont tu as senti la force persuasive, ont démontré clairement que l'âme n'occupe pas d'espace, et qu'en conséquence elle n'a point l'espèce de grandeur que nous voyons dans les corps; tu n'imagines aucun moyen d'expliquer comment un animal en particulier, lorsqu'il est mis en pièces, vit dans toutes ses parties, et tu vas supposer que l'âme a pu être divisée avec le corps? Si nous ne pouvons découvrir la cause de ce phénomène, ne faut-il pas mieux continuer à chercher la véritable que d'en admettre une fausse?