CHAPITRE LXXXVII. SENS PROPHÉTIQUE DU PÉCHÉ DE DAVID.
Je dirai maintenant le plus brièvement possible quel était le sens prophétique du péché de David[^1]. L'interprétation seule des mots indique déjà ce que ce fait figurait. David veut dire « Fort de la main », ou « Désirable ». Or, quoi de plus fort que ce lion de la tribu de Juda, qui a vaincu le monde[^2]? Et quoi de plus désirable que celui dont le Prophète a dit : « Le désiré de toutes les nations viendra[^3]? » D'après les interprètes, Bersabée veut dire « Puits de rassasiement ou septième puits ». Or, laquelle que ce soit de ces deux significations que nous adoptions, nous la trouverons assez convenable; car l'Eglise est cette épouse du Cantique des cantiques, que l'on appelle « Puits d'eau vive[^4] » : et le nombre sept s'adapte à ce puits à cause du Saint-Esprit, à raison de la Pentecôte qui est le jour où le Saint-Esprit descendit du ciel[^5]. En effet, il est constant que ce jour se forme de semaines, ainsi que l'atteste le livre de Tobie[^6]. Or, à quarante-neuf, résultat de sept multiplié par sept, on ajoute un pour signifier l'unité. C'est à cette raison que se rapporte la pensée de l'Apôtre : « Vous supportant mutuellement en charité, appliqués à conserver l'unité d'esprit, par le lien de la paix[^7] ». Ainsi, en vertu du don spirituel, c'est-à-dire septénaire, l'Eglise est devenue le puits de rassasiement; parce qu'il s'est formé en elle « une source d'eau jaillissante jusqu'à la vie éternelle», et que celui qui en boira «n'aura jamais soif[^8] ». Quant à Urie, l'époux de Bersabée, que signifie son nom, si ce n'est le diable, à qui étaient unis par une alliance détestable, tous ceux que la grâce de Dieu affranchit, pour qu'une Eglise sans tache et sans ride soit unie à son véritable Sauveur[^9] ? En effet, Urie est interprété « ma lumière de Dieu » ; et Chettéen (Héthéen) veut dire « Coupé», c'est-à-dire ou qui n'est pas demeuré dans la vérité[^10], mais a été séparé, à cause de son orgueil, de la lumière supérieure qu'il tenait de Dieu; ou qui, tombé pour avoir perdu ses véritables forces, se transforme cependant en ange de lumière[^11] et ose encore dire : Ma lumière est de Dieu. David a donc commis un péché grave, monstrueux; Dieu le lui reproche vivement par la voix du prophète, et il le lave lui-même par le repentir néanmoins le Désiré de toutes les nations a aimé l'Eglise se lavant sur le toit, c’est-à-dire se purifiant des souillures du siècle, s'élevant par la contemplation spirituelle, au-dessus de la maison de boue et la foulant aux pieds; puis, après avoir fait une première connaissance en s'unissant à elle, il en a tout à fait éloigné le démon, qu'il a tué ensuite, et contracté avec elle une alliance perpétuelle. Haïssons donc le péché, mais ne lui ôtons pas son sens prophétique; aimons, autant qu'il mérite de l'être, le David qui nous a délivrés du démon par sa miséricorde ; aimons aussi l'autre David qui a guéri en lui, par l'humilité de la pénitence, la grave blessure que lui avait faite son iniquité.
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II Rois. XI.
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Apoc. V, 5.
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Agg. II, 8.
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Cant. IV, 15.
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Act. II, 1, 4.
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Tob. II, suiv. les Sept.
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Eph. IV, 2, 3.
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Jean, IV, 14, 13.
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Eph. V, 27.
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Jean, VIII, 44.
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II Cor. XI, 14.