Traduction
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De la grandeur de l'âme
73.
Lève donc les yeux et t'élance sur ce quatrième degré. Ici commence la vertu, et tout ce qui est vraiment digne de louanges. Là, en effet, l’âme ose se préférer, non-seulement à son corps, quelque ;partie qu'il fasse de l'univers, mais aussi à tous les corps; elle ne regarde pas les biens du monde comme ses propres biens, et quand elle les compare à sa puissance et à sa beauté, loin de les confondre elle les méprise. Plus elle se plaît à cela, plus elle se détache de ce qui la souille, se purifie et s'embellit. Elle commence aussi à s'armer contre tous les obstacles qui font effort pour la faire renoncer à son dessein et à son sentiment; elle estime singulièrement la grande communauté humaine et ne veut pas pour autrui ce dont elle ne voudrait pas pour elle-même; elle suit la direction de l'autorité et les conseils des sages, où elle croit entendre la voix de Dieu même.
Il est vrai le travail se fait sentir dans cette magnifique occupation de l'âme; il faut lutter fortement et courageusement contre les adversités et les séductions du siècle. Car, en se purifiant ainsi, l'âme craint la mort, souvent assez peu et souvent beaucoup. Assez peu, quand, incapable encore de voir la vérité comme la voient les âmes bien pures, elle croit fermement que tout est gouverné par la haute providence et la justice de Dieu, et que la mort ne frappe personne injustement lors même qu'elle serait infligée par une main coupable. On craint beaucoup la mort lorsqu'on croit d'autant plus faiblement à cette Providence divine, qu'on la cherche avec plus de soucis ; lorsqu'on la distingue d'autant moins que la tranquillité d'esprit, indispensable à l'examen des questions obscures, est plus troublée par cette crainte même. Ensuite, plus l'âme sent dans les progrès qu'elle fait, combien il y a de différence entre être pur ou être souillé; plus elle redoute qu'en quittant ce corps elle ne trouve Dieu plus sévère contre ses fautes qu'elle ne l'est elle-même. Mais rien n'est plus difficile que d'avoir horreur de la mort et de renoncer aux plaisirs du monde autant que le demandent les dangers qu'on y court. L'âme toutefois est si grande, qu'elle le peut, mais avec le secours du Dieu véritable et souverain, de cette justice qui soutient et dirige cet univers, qui a donné l'existence à tout, et une telle existence que ce tout ne saurait être meilleur. C'est donc à cette justice qu'elle se confie avec piété et sécurité, pour obtenir d'être aidée et comme achevée, dans l'oeuvre si difficile de sa sanctification.
Edition
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De quantitate animae (PL)
73.
Suspice igitur atque insili quarto gradui, ex quo bonitas incipit, atque omnis vera laudatio. Hinc enim anima se non solum suo, si quam universi partem agit, sed ipsi etiam universo corpori audet praeponere, bonaque ejus bona sua non putare, atque potentiae pulchritudinique suae comparata discernere atque contemnere: et inde quo magis se delectat, eo magis sese abstrahere a sordibus, totamque emaculare ac mundissimam reddere et comptissimam; roborare se adversus omnia, quae de proposito ac sententia dimovere moliuntur; societatem humanam magni pendere, nihilque velle alteri quod sibi nolit accidere; sequi auctoritatem ac praecepta sapientium, et per haec loqui sibi Deum credere. In hoc tam praeclaro actu animae inest adhuc labor, et contra hujus mundi molestias atque blanditias magnus acerrimusque conflictus. In ipso enim purgationis negotio subest metus mortis saepe non magnus, saepe vero vehementissimus: non magnus tum cum robustissime creditur (nam videre hoc utrum sit verum, non nisi perpurgatae animae licet) tanta Dei providentia justitiaque gubernari omnia, ut nulli mors inique accidere possit, etiamsi eam forte iniquus intulerit. Vehementer autem formidatur mors in hoc jam gradu, cum et illud eo creditur infirmius, quo sollicitius quaeritur; et eo ipso minus videtur, quo tranquillitas propter metum minor est, investigandis obscurissimis rebus pernecessaria. Deinde quo magis magisque sentit anima, eo ipso quo proficit, quantum intersit inter puram et contaminatam; eo magis timet, ne, deposito isto corpore, minus eam possit Deus quam seipsa ferre pollutam. Nihil autem difficilius quam et metuere mortem, et ab illecebris hujus mundi, sicut pericula ipsa postulant, temperare. Tanta est tamen anima, ut etiam hoc possit adjuvante sane justitia summi et veri Dei, qua haec universitas sustentatur et regitur; qua etiam factum est, ut non modo sint omnia, sed ita sint, ut omnino melius esse non possint. Cui [Col. 1076] sese in opere tam difficili mundationis suae adjuvandam et perficiendam piissime tutissimeque committit.
Quintus gradus animae.