69.
Ecoute maintenant, si tu veux, ou plutôt reconnais avec moi quelle est la grandeur de l'âme, cette grandeur qui ne consiste ni dans le temps ni dans le lieu, mais dans la force et la puissance : car, s'il t'en souvient, c'est ainsi que dès le début nous avons établi et divisé cette question.
Tu penses que le nombre des âmes se rattache également à cette question1 ; mais je ne sais que te répondre sur ce sujet. J'aurais plus vite fait de dire : On ne doit pas absolument s'en occuper ou au moins, tu ne dois pas l'agiter encore, que de prouver qu'à la quantité ne se rapporte ni la multitude ni le nombre, ou que je puis à présent dégager de ses difficultés une question si embarrassée. Dirai-je en effet qu'il n'y a qu'une seule âme? Tu ne comprendras point comment elle est malheureuse dans celui-ci, heureuse dans celui-là: car la même chose ne saurait être à la fois heureuse et malheureuse. Dirai-je qu'il y a une âme et plusieurs âmes? Tu te riras de moi et je ne vois pas trop comment je pourrai t'empêcher de le faire. Dirai-je seulement qu'il yen a plusieurs? C'est moi, qui me rirai de moi alors, et je pourrai moins` supporter mon propre mépris que le tien. Ecoute donc ce que tu peux fort bien entendre de moi, sans te charger ni me charger d'un fardeau qui pourrait nous accabler l'un ou l'autre, ou bien nous accabler tous les deux . — Ev. J'y consens: expose-moi donc ce que tu crois convenable de traiter avec moi, quelle est la puissance de l'âme.
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En rattachant à la Grandeur de l'âme la question du nombre des âmes, Evodius se fondait sur ce que le substantif latin quantitas, et l'adjectif correspondant quantus , s'entendent du nombre comme de la grandeur proprement dite. ↩