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Œuvres Augustin d'Hippone (354-430)

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De la doctrine chrétienne

CHAPITRE XII. RÈGLE POUR JUGER DES ACTIONS QUI PARAISSENT CRIMINELLES.

18. Il est en outre des paroles et des actions que l'Écriture attribue à Dieu et â ces hommes dont elle proclame la sainteté, et qui paraissent des crimes aux yeux de l'ignorance. Ce sont autant de figures dont les significations mystérieuses, une fois connues, servent d'aliment à la charité. User des choses passagères avec plus de modération qu'on ne le fait habituellement autour de soi, c'est agir par sobriété ou par superstition. Mais, dépasser, dans cet usage, les bornes où se . renferment ordinairement les hommes vertueux, c'est une conduite qui est ou un mystère, ou un crime. Car ce n'est pas un tel usage en lui-même, mais la passion qui le détermine, qui est un mal. Jamais un esprit réfléchi n'assimilera l'action de cette femme qui répandit sur les pieds du Sauveur un parfum précieux 1, à ce qui se pratique dans les orgies abominables des hommes livrés a la corruption et à l'impudicité. C'est un parfum délicieux qu'une bonne réputation; celui qui la mérite parles œuvres d'une vie sainte, en marchant sur les traces du Christ, oint en quelque sorte ses pieds du plus suave parfum. Ainsi ce qui, pour le commun des hommes, est le plus souvent un crime, en Dieu, ou dans un prophète, devient la figure d'un grand mystère. Il y a loin de l'alliance que contracté un homme perdu de mœurs avec une prostituée, à celle que le prophète Osée contracta comme un présage 2. Si c'est un crime pour des hommes livrés aux excès je l'ivresse et de la débauche, de paraître nus dans leurs festins, ce n'en est pas un de se mettre nu dans un bain.

19. Il importe donc de considérer attentivement ce qui convient aux lieux, aux temps et aux personnes, pour ne pas crier témérairement ;tu crime. L'homme sage pourra manger modérément et sans avidité d'un mets exquis, tandis que l'insensé se jettera avec une voracité brutale sur des aliments grossiers. Ne vaut-il pas mieux manger du poisson comme fit le Seigneur 3, que des lentilles à la manière d'Esaü, petit-fils d'Abraham 4, ou de l'orge à la manière des brutes? Pour avoir une nourriture plus vile, les animaux n'en sont pas plus sobres que nous. Sous ce rapport, la règle d'après laquelle nos actions sont à louer ou à condamner, se tire, non de la nature des choses dont nous usons, mais du motif qui nous en fait user, et du désir que nous en éprouvons.

20. Pour les anciens justes, les royaumes de la terre étaient l'image et l'annonce dit royaume du ciel. C'était, de leur temps, une coutume innocente qu'un homme eût à la fois plusieurs femmes, pour rendre sa postérité plus nombreuse 5 ; et par là même, il n'était pas permis à une femme d'avoir plusieurs maris, puisqu'elle ne pouvait en devenir plus féconde : s'abandonner ainsi en vue du gain ou des enfants, c'est plutôt chez la femme prostitution et débauche. L'Écriture n'a point condamné la conduite de ces saints personnages, autorisée par les mœurs de leur époque, et où la passion n'avait aucune part, bien qu'aujourd'hui on ne puisse se la permettre sans crime. Tous les faits de ce genre qu'elle a consignes, qu'on les prenne dans le sens propre et historique, ou dans le sens prophétique et figuré, doivent être expliqués comme ayant pour fin l'amour de Dieu ou du, prochain, ou l'amour de l'un et de l'autre. C'était autrefois chez les Romains une infamie de porter de longues robes à manches , tandis qu'aujourd'hui c'est une honte pour les fils de famille distinguée de ne pas les porter ainsi. De même dans tout autre usage, doit-on s'attacher à bannir la passion qui, non-seulement fait un abus criminel des coutumes autorisées dans la société contemporaine, mais encore franchissant toutes les bornes, se jette dans les plus honteux écarts, et étale au grand jour ses ignobles convoitises, cachées jusqu'alors sous le voile des moeurs publiques.


  1. Jean, XII, 3.  ↩

  2. Osée, I, 2.  ↩

  3. Luc, XXIV, 43.  ↩

  4. Gen. XXV, 34. ↩

  5. Gen. XVI, 3 ; XXV, 1 ; II Rois V, 13. ↩

Edition Masquer
De doctrina Christiana

CAPUT XII.-- Regula de dictis et factis quasi flagitiosis imperitorum judicio, quae Deo vel sanctis viris tribuuntur. Facta judicantur ex circumstantiis.

18. Quae autem quasi flagitiosa imperitis videntur, sive tantum dicta, sive etiam facta sunt, vel ex Dei [P. 0073] persona, vel ex hominum quorum nobis sanctitas commendatur, tota figurata sunt: quorum ad charitatis pastum enucleanda secreta sunt. Quisquis autem rebus praetereuntibus restrictius utitur, quam sese habent mores eorum cum quibus vivit, aut temperans aut superstitiosus est: quisquis vero sic eis utitur, ut metas consuetudinis bonorum inter quos versatur, excedat, aut aliquid significat, aut flagitiosus est. In omnibus enim talibus non usus rerum, sed libido utentis in culpa est. Neque ullo modo quisquam sobrius crediderit, Domini pedes ita unguento pretioso a muliere perfusos 1, ut luxuriosorum et nequam hominum solent, quorum talia convivia detestamur. Odor enim bonus, fama bona est, quam quisquis bonae vitae operibus habuerit, dum vestigia Christi sequitur, quasi pedes ejus pretiosissimo odore perfundit. Ita quod in aliis personis plerumque flagitium est, in divina vel prophetica persona magnae cujusdam rei signum est. Alia est quippe in perditis moribus, alia in Osee prophetae vaticinatione conjunctio meretricis 2: nec, si flagitiose in conviviis temulentorum et lascivorum nudantur corpora; propterea in balneis nudum esse flagitium est.

19. Quid igitur locis et temporibus personisque conveniat, diligenter attendendum est, ne temere flagitia reprehendamus. Fieri enim potest ut sine aliquo vitio cupediae vel voracitatis, pretiosissimo cibo sapiens utatur; insipiens autem foedissima gulae flamma in vilissimum ardescat. Et sanus quisque maluerit more Domini pisce vesci 3, quam lenticula more Esau nepotis Abraham 4, aut hordeo more jumentorum. Non enim propterea continentiores nobis sunt pleraeque bestiae, quia vilioribus aluntur escis. Nam in omnibus hujuscemodi rebus, non ex earum rerum natura quibus utimur, sed ex causa utendi et modo appetendi vel probandum est, vel improbandum quod facimus.

20. Regno terreno veteres justi coeleste regnum imaginabantur, et praenuntiabant. Sufficiendae prolis causa erat uxorum plurium simul uni viro habendarum inculpabilis consuetudo 5; et ideo unam feminam maritos habere plurimos honestum non erat: non enim mulier eo est fecundior, sed meretricia potius turpitudo est, vel quaestum vel liberos vulgo quaerere. In hujuscemodi moribus quidquid illorum temporum sancti non libidinose faciebant, quamvis ea facerent quae hoc tempore nisi per libidinem fieri non possunt, non culpat Scriptura. Et quidquid ibi tale narratur, non solum historice ac proprie, sed etiam figurate ac prophetice acceptum, interpretandum est usque in finem illum charitatis, sive Dei, sive proximi, sive utriusque. [P. 0074] Sicut enim talares et manicatas tunicas habere apud Romanos veteres flagitium erat; nunc autem honesto loco natis, cum tunicati sunt, non eas habere flagitium est: sic animadvertendum est, in caetero quoque usu rerum abesse oportere libidinem, quae non solum ipsa eorum, inter quos vivit, consuetudine nequiter abutitur; sed etiam saepe fines ejus egressa, foeditatem suam, quae inter claustra morum solemnium latitabat, flagitiosissima eruptione manifestat.


  1. Joan. XII, 3  ↩

  2. Osee I, 2 ↩

  3. Luc. XXIV, 43  ↩

  4. Gen. XXV, 34 ↩

  5. Id. XVI, 3, XXV, 1; et II Reg. V, 13 ↩

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