CHAPITRE XXX. RÈGLES DU DONATISTE TICHONIUS.
12. Un certain Tichonius, qui a vivement combattu les Donatistes dans ses écrits, tout Donatiste qu'il était, et dont l'aveuglement nous parait d'autant plus étrange qu'il n'abandonna pas entièrement cette secte, a composé un livre intitulé « des Règles », parce qu'il y expose sept règles à l'aide desquelles on peut pénétrer dans les mystères cachés de l'Ecriture. La première est « de Notre-Seigneur et de son corps » ; la seconde, « du corps du Seigneur partagé en deux » ; la troisième des promesses et de la loi » ; la quatrième, de l'espèce et du genre » ; la cinquième, « des temps » ; la sixième, «de la récapituliation»; la septième, « du démon et de son corps » . Considérées de la manière dont il les expose, ces règles sont certainement d'un grand secours pour porter la lumière dans les obscurités des saints Livres ; mais elles ne suffisent pas toujours, car on doit recourir encore à bien d'autres moyens pour résoudre toutes les difficultés; Tichonius lui-même, en plusieurs circonstances, les a laissées de côté comme inutiles. Aucune de ces règles, par exemple, n'avait de rapport à la question de savoir ce qu'il faut entendre par les anges des sept Églises, dont il est parlé dans l'Apocalypse, et auxquels saint Jean avait reçu l'ordre d'écrire. C'est par une suite de raisonnements qu'il arrive à conclure que ces anges représentent les Eglises, mêmes 1. Sa longue dissertation sur un point aussi difficile à élucider ne fait aucune mention des dites règles. Je me borne à ce seul exemple, par ce que ce serait une tâche trop langue et trop pénible d'énumérer tous les passages pour lesquels elles demeurent insuffisantes.
43. L'auteur, en les recommandant leur attribuait une portée telle, que leur emploi intelligent pouvait faire jaillir la lumière de toutes les parties de l'Ecriture. Voici comme il débute : « Rien ne m'a paru plus nécessaire que d'écrire un livre des Règles, et d'y donner comme autant de clefs et de flambeaux pour pénétrer dans les secrets de la Loi. Ces règles mystérieuses sondent toutes les profondeurs, et ouvrent le trésor de la vérité à ceux qui ne pouvaient les découvrir. Si on les reçoit avec la même simplicité que nous les donnons, tout ce qui est fermé s'ouvrira, tout ce qui est voilé sera éclairci, et quiconque voudra parcourir l'immense forêt des prophéties, sera conduit comme par des sentiers lumineux qui l'éloigneront de toute erreur. » S'il se fût contenté de dire que ces règles mystérieuses sondent quelques-unes des profondeurs, même les plus secrètes, des divins oracles, et aplanissent grand nombre de difficultés, sans présumer vouloir tout éclaircir, il fût resté dans le vrai. Sans donner à son livré, si utile d'ailleurs et si bien travaillé, un mérite exagéré, il n'eût pas flatté d'une vaine attente le lecteur qui en prendrait connaissance. J'ai cru devoir consigner ici ces réflexions pour engager les esprits studieux à lire ce livre assurément très-propre à faciliter l'intelligence de l'Ecriture, et pour prévenir de ne pas entendre plus qu'il ne renferme. Il doit être lu avec prudence, en raison de quelques erreurs qu'il faut attribuer à la fragilité humaine, mais principalement à cause des maximes hérétiques que l'auteur y a émises comme Donatiste. Je vais expliquer en peu de mots les avis et les instructions renfermées dans ces règles.
Apoc. 1, 20. ↩
