CHAPITRE XXVII. LES JUIFS AURAIENT PU FAIRE CE QU'A FAIT LE MONDE ENTIER.
Mais tu n'aurais pas ajouté : « Que la tradition du Christ diffère de celle de Moïse; qu'il n'est donc pas vraisemblable que si les Juifs eussent cru à Moïse, ils eussent aussi cru au Christ; qu'on doit plutôt dire, au contraire, que, en croyant à l'un des deux, ils rejetaient nécessairement l'autre » ; non, tu n'aurais pas dit cela, si tu avais un peu élevé les yeux de ton âme, et considéré, en dehors des nuages de l'esprit d'aveugle dispute, l'univers entier croyant en même temps à Moïse et au Christ, dans la personne des savants et des ignorants, des Grecs et des Barbares, des sages et des simples, auxquels l'Apôtre se disait redevable[^1]. Si donc il n'était pas vraisemblable que les Juifs eussent cru tout à la fois à Moïse et au Christ, il l'est beaucoup moins que le monde entier croie également à l'un et à l'autre. Mais comme nous voyons toutes les nations croire à tous les deux, tenir d'une foi inébranlable et solennelle à la prophétie de l'un comme s'accordant avec l'Evangile de l'autre, ce n'était pas exiger de la nation juive une chose impossible, que de lui dire : « Si vous croyiez Moïse, vous me croiriez sans doute aussi ». Il faut plutôt s'étonner et se plaindre vivement de la dureté des Juifs, qui n'ont pas fait ce que le monde entier fait sous nos yeux.
- Rom. I, 14.