« Toute créature de Dieu est bonne. »
Se servir des mets offerts par la Providence peut être un bien, s'en abstenir peut être un mal.
Considérons maintenant ce que c'est que le jeûne, et voyons si c'est un bien, comme la justice, la prudence, la force et la tempérance; c'est-à-dire un bien qui ne puisse jamais devenir un mal, ou si c'est une chose qui soit d'elle-même indéterminée et indifférente, qu'on puisse faire quelquefois utilement, qu'on puisse aussi omettre innocemment, en sorte qu'en certaines occasions on soit blâmable pour en avoir usé, et qu'en autres on soit louable pour n'en avoir point usé. Car si nous mettons le jeûne au rang des vertus, dont nous venons de parler, et que nous regardions l'abstinence des viandes comme un bien principal et essentiel, il faut demeurer d'accord que l'on ne peut faire que mal, lorsqu'on use de viandes. Car il est indubitable que ce qui est contraire à un bien essentiel, est essentiellement un mal.
Mais l'autorité de l'Écriture ne nous permet pas de porter ce jugement du jeûne. Car si nous jeûnions dans une telle pensée que nous croirions faire un crime de manger, nous ne retirerions aucun fruit de notre, abstinence. Elle deviendrait au contraire, selon saint Paul, un très grand péché, et même un sacrilège, puisque nous nous abstiendrions superstitieusement des viandes que Dieu a créées, afin que ses fidèles et ceux qui connaissent la vérité en usent avec action de grâces : « Parce que toute créature de Dieu est bonne, et il ne faut rien rejeter de ce qu'on reçoit avec action de grâces. Car lorsqu'un homme croit que quelque chose est impure, elle devient impure pour lui. » Et nous ne voyons point que personne ait jamais été condamné simplement pour avoir usé de quelque viande, à moins qu'il n'y eût quelque circonstance ou devant ou après cet usage qu'il en faisait, qui méritât cette condamnation. (Coll., XXI, 13. P. L., 49, 1187.)
Le combattant doit avoir assez de forces pouf soutenir la lutte.
Il faut donc proportionner à ses forces la quantité d'aliments.
On ne peut pas fixer cette quantité dans une règle générale.
De même que le corps chargé d'un excès d'aliments rend l'âme languissante et molle, de même une abstinence trop sévère débilite, an point que la partie de l'âme qui s'adonne à la contemplation, est dans la tristesse et dans le dégoût de la parole céleste. Il faut donc adapter la nourriture à l'état du corps de sorte qu'on mate le corps convenablement quand il est en santé, et qu'on le soigne avec modération quand il est en moins bon état. Le combattant ne doit pas en effet être infirme dans son corps, mais avoir assez de forces pour soutenir la lutte, et l'âme doit aussi être déchargée des trop grandes misères corporelles. (Diadoque, 45. P. G., 65, 1181.)