Les différences de tempérament.
Deux frères succombant à la tentation quittèrent la solitude et se marièrent. Quelque temps après, ils se dirent l'un à l'autre : « Quel avantage tirons-nous d'avoir abandonné une manière de vie toute angélique pour en prendre une si impure et passer de là dans des tourments éternels ? Retournons dans le désert pour y faire pénitence de notre péché ». Ainsi ils s'en retournèrent et après avoir confessé leur faute, ils prièrent les saints pères de les recevoir à pénitence. Ce que leur ayant accordé, ils les tinrent enfermés un an entier et leur donnaient également par poids et par mesure du pain et de l'eau. Le temps de leur pénitence étant achevé et étant sortis, ces bons pères s'étonnèrent extrêmement de ce que se ressemblant auparavant fort de visage, l'un d'eux était fort pâle et fort triste et l'autre vermeil et fort gai, vu qu'il n'y avait eu nulle différence en leur nourriture. Sur quoi, ayant demandé à celui qui était triste quelles étaient les pensées dont il s'entretenait dans sa cellule, il leur répondit « Je pas, sais et repassais par mon esprit les peines que je méritais de souffrir pour le châtiment de mes péchés et ma frayeur a été telle que ma peau s'est séchée et comme collée sur mes os. » Ils demandèrent ensuite à l'autre : « Et vous, à quoi pensiez-vous dans votre cellule? » « Je rendais grâces à Dieu, leur répartit-il, de ce qu'il lui avait plu me retirer de la corruption de ce monde et me garantir des tourments de l'autre, pour me rappeler à cette manière de vivre toute angélique. Ainsi ayant continuellement la bonté de mon Sauveur devant les yeux, j'étais plein de consolation et de joie. » Ces sages vieillards les ayant entendu parler de la sorte, jugèrent que leur pénitence était égale devant Dieu. (Pélage, V, 34. P. L., 73, 882.)