CHAPITRE VIII. CE QU’IL AVAIT AIMÉ DANS CE LARCIN.
16. Malheureux! quel avantage trouvais-je donc alors dans ces actions, dont aujourd’hui la pensée me fait rougir (Rom. VI, 21), et surtout dans ce vol où je n’aimai que lui; rien que lui, rien sans doute, car lui-même n’était rien… pour moi cependant un surcroît de misère! et pourtant seul je ne l’eusse pas fait. Ma mémoire me représente bien mon âme alors; non, seul, je ne l’eusse pas fait. C’est donc, en outre, la société de mes complices que j’ai aimée. J’ai donc aimé autre chose que le vol ? Mais quoi? rien; car cela même encore n’est rien.
Qu’y a-t-il donc là en réalité? Qui me l’enseignera, que Celui qui éclaire mon coeur et en dissipe les ténèbres? Quelle est enfin la cause de cet acte coupable? Mon esprit la recherche; il la poursuit; il veut la pénétrer. Si j’aimai ces fruits, si je les désirai, que ne les volai-je seul? Ne suffisait-il pas à ma convoitise de commettre l’iniquité sans envenimer par le frottement de la complicité les démangeaisons de mon désir? Mais ce plaisir que ces fruits ne me donnaient pas, je ne le trouvais dans le péché que par cette association de pécheurs.
