24.
Donc, selon la foi chrétienne qui ne peut tromper, le corps ressuscitera. Celui qui trouve cela incroyable ne considère que la chair telle qu'elle est aujourd'hui, et non ce qu'elle sera un jour: car lorsqu'elle sera transformée en la nature des anges, ce sera simplement un corps, et non plus de la chair et du sang. En effet l'Apôtre, en parlant de la chair, dit: « Autre est la chair des brebis, autre celle des oiseaux, autre celle des poissons, autre celle des serpents ; il y a aussi des corps célestes et des corps terrestres ; » il ne dit pas : Il y a aussi une chair céleste, mais : « des corps terrestres et des corps célestes. » Car toute chair est corps, mais tout corps n'est pas chair; d'abord, dans les choses terrestres, le bois est un corps et n'est point une chair; mais l'homme et l'animal sont corps et chair; tandis que dans le ciel, il n'y a pas de chair, mais des corps simples et transparents, que l'Apôtre appelle spirituels, et que quelques-uns, nomment éthérés. L'Apôtre ne contredit donc pas le dogme de la résurrection, quand il dit. « La chair et le sang ne posséderont pas le royaume de Dieu; » il exprime simplement ce que deviendra un jour ce qui est aujourd'hui chair et sang 1.
Il faut conduire pas à pas à la foi celui qui ne croit pas à cette transformation de la nature de la chair. Demandez-lui d'abord si la terre peut-être changée en eau; cela lui paraîtra possible, à cause de l'analogie de ces deux éléments. Demandez-lui ensuite si l'eau peut se changer en air; il répondra que cela n'est pas incroyable, parce que ce sont deux choses rapprochées l'une de l'autre. Demandez-lui enfin, si l’air peut se transformer en un corps éthéré, c'est-à-dire céleste; le rapport de similitude le lui fera admettre volontiers. Or ce qu'il croit possible par gradation, à savoir que la terre soit convertie en un corps éthéré, pourquoi ne reconnaîtrait-il pas que la volonté du Dieu qui a fait marcher un corps humain sur les eaux, peut en faire autant, instantanément, « en un clin-d'oeil, » comme dit l'Apôtre, sans transition, avec la rapidité merveilleuse que met ordinairement la fumée à se changer en feu? Notre chair est en effet certainement faite de terre; or les philosophes, sur l'autorité desquels on combat ordinairement le dogme de la résurrection, et qui prétendent qu'il ne peut y avoir de corps terrestres dans le ciel, les philosophes, dis-je, accordent qu'un corps peut-être changé et transformé en toute autre espèce de corps. La résurrection une fois opérée, nous serons affranchis de la condition du temps, et nous jouirons d'une vie éternelle, d'une charité ineffable et d'un état permanent et incorruptible. C'est alors que s'accomplira cette parole de l'Ecriture: « La mort a été absorbée dans sa victoire. O mort, où est ton aiguillon? O mort, où est ta puissance 2 ?»
