36.
Il y a dans ces combinaisons un autre principe de différence, le voici : Parmi les mètres, les uns sont unis entre eux de telle façon qu'ils n'exigent l'interposition d'aucun silence, comme dans l'exemple précédent d'autres exigent qu'on interpose quelque silence, comme dans cet exemple :
Vides ut alla stet nive candidum
Soracte, nec jam sustineant onus
Silvae laborantes, geluque
Flumina constiterint acuto1.
Si l'on revient dans chacun de ces mètres au commencement, les deux premiers exigent à la fin un silence d'un temps, le troisième un silence de deux temps, le quatrième un silence de trois temps. Réunis ensemble, ils obligent, quand on passe du premier au second, à observer un silence d'un temps, du second au troisième, un silence de deux temps, du troisième au quatrième, un silence de trois temps. Et si tu reviens du quatrième au premier, il faudra garder un silence d'un temps. Le procédé, pour revenir du quatrième au premier, est le même quand il s'agit de passer à une seconde combinaison du même genre. Ces combinaisons nous les appelons, avec raison, circuit2, ce qui répond au mot grec, période. Une période ne peut avoir moins de deux membres, c'est-à-dire de deux mètres, et on a décidé qu'elle ne pourrait avoir plus de quatre membres ou mètres. On peut donc appeler la plus petite période, période à deux membres, la période intermédiaire, période à trois membres, et la dernière période, période à quatre membres, ce qui répond aux mots grecs dikolon trikolon tetrakolon
Comme nous devons traiter ce sujet avec tous les développements qu'il comporte dans notre entretien sur le vers, nous bornerons là nos réflexions pour le moment.
Tu vois comme se dresse, toute couverte d'une neige épaisse, la blanche cime du Soracte, comme les forêts ont peine à soutenir le fardeau des frimas, comme les ruisseaux sont immobiles sous les étreintes de la gelée. (Hor. liv. 1. ode 9.) ↩
Dis, deux ; kolon, membre : en français, strophe. Mais la strophe en vers correspond à la période en prose. ↩
