IV.
Mon frère, réfléchissez donc, je vous en prie. Vous me demandez pourquoi je vous cherche? Je réponds : C'est parce que vous êtes mon frère. Vous insistez et vous dites Puisque je suis perdu, pourquoi me cherchez-vous? Je vous réponds : Si vous n'étiez pas perdu, je ne vous chercherais point. Pourquoi me chercher? dites-vous. Si je suis perdu, pourquoi me chercher? Je vous réponds . Je vous cherche parce que vous êtes perdu. Et pourquoi vous chercher? et quel avantage puis-je avoir à vous chercher ? C'est afin que vous me disiez un jour : « Votre frère était mort, et il est ressuscité ; il était perdu, et il est retrouvé1 ». Mais, me dites vous, j'ai les sacrements. Je le sais, et voilà pourquoi je vous cherche. Vous ajoutez là un puissant motif pour enflammer le désir que j'éprouve de vous chercher. Vous êtes une brebis du troupeau de mon Seigneur, et-vous avez ce caractère ; et c'est parce que vous errez avec ce caractère, et c'est parce que vous avez ce caractère que je vous cherche sans relâche. Pourquoi ne sommes-nous pas les membres d'une seule et même Eglise? Puisque nous avons le même caractère, pourquoi ne sommes-nous pas du même troupeau? Je vous cherche, afin que ce sacrement soit pou r vous un moyen de salut, et non un gage de réprobation. Ne savez-vous pas que le déserteur est condamné à cause de son caractère; et que ce même caractère est pour le soldat fidèle son plus beau titre d'honneur ? Je vous cherche donc pour vous empêcher de périr avec ce caractère. Il est pour vous un signe de salut, si vous avez le salut, si vous avez la charité. En dehors de l'unité de l'Eglise, vous pouvez porter encore le signe du salut, mais ce signe ne vous sera d'aucune utilité. Venez, afin de tirer profit de ce que vous avez, et non afin de recevoir ce que vous possédez; venez, afin que ce que vous aviez commence à vous servir, et que vous receviez ce que vous n'avez pas. Vous aviez le signe de là paix sans avoir la paix elle-même. La discorde habitait en cette demeure, c'est-à-dire en vous, et cependant le frontispice portait le signe de la paix. Je distingue parfaitement l'enseigne de cette demeure, mais je cherche celui qui l'habite. Je lis l'inscription de la paix, c'est le baptême au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit; mais je cherche celui qui l'habite; j'ai les yeux fixés sur mon frère, et je reconnais en lui le signe de la paix. Je porte moi-même ce titre et je veux entrer. Quoi donc, je veux entrer? Recevez-moi en qualité de frère, afin que nous priions ensemble notre Père. Je ne prie pas avec vous. Nous portons tous deux le signe de la paix, et la discorde me fait opposition ? Avec l'aide de Dieu, je déploierai toutes mes forces pour chasser la discorde, qui n'a aucun droit d'habiter cette demeure, et y introduire la paix, son légitime possesseur. Parce que je chasse la discorde et que j'introduis la paix, est-ce une raison pour conclure que je me dépouille des titres de la paix ? Je dis en toute sincérité à mon Seigneur : O Christ, qui êtes notre paix, qui avez tout créé dans l'unité2, établissez-nous dans l'unité, afin que nous chantions en toute vérité: « Qu'il est bon, qu'il est agréable à des frères, d'habiter la même demeure3 !» Donnez-nous la concorde, chassez la discorde; venez habiter vous-même dans ces demeures qui portent votre caractère. Demeurez-y à jamais; que personne n'y prenne votre place et ne se serve de vos titres pour mieux tromper. Convertissez ce contradicteur, vous qui en un moment, sur la croix, avez converti le larron4.
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