CHAPITRE XXI. IL TROUVE DANS L’ÉCRITURE L’HUMILITÉ ET LA VRAIE VOIE DU SALUT.
27. Je dévorai donc avidement ces vénérables dictées de votre Esprit, et surtout l’apôtre Paul; et, en un moment, s’évanouirent ces difficultés où il m’avait paru quelquefois en contradiction avec lui-même, et son texte en désaccord avec les témoignages de la Loi et des Prophètes. Et je saisis l’unité de physionomie de ces chastes éloquences, et je connus cette joie où l’on tremble.
Et j’appris aussitôt que tout ce que j’avais lu de vrai dans ces autres livres s’enseignait ici avec l’idée toujours présente de votre grâce, afin que celui qui voit ne se glorifie pas, comme s’il n’eût pas reçu, non-seulement ce qu’il voit, mais aussi de voir. (Qu’a-t-il, en effet, qu’il n’ait reçu ( I Cor. IV, 7)?) afin que votre parole lui donne non-seulement les yeux pour voir, mais aussi la force pour embrasser votre immutabilité; afin que le voyageur encore trop éloigné pour vous découvrir, prenne la bonne route, vienne à vous, vous voie et vous embrasse.
Que si l’homme se plaît dans la loi de Dieu, selon l’homme intérieur, que fera-t-il de cette autre loi , incarnée dans ses membres, qui (427) combat contre la loi de son esprit, et le traîne captif sous cette loi de péché qui lui est incorporée (Rom. VII, 22, 23. )? Car « vous êtes juste, Seigneur; ce sont nos péchés, nos iniquités, nos offenses, qui ont appesanti sur nous votre main ( Dan. III, 27-32).» Et votre justice nous a livrés à l’antique pécheur, au prince de la mort, qui a persuadé à notre volonté l’imitation de sa volonté déchue de votre vérité (Jean VIII, 44).
Que fera cet homme de misère? « Qui le délivrera du corps de cette mort, sinon votre grâce par Jésus-Christ Notre-Seigneur (Rom. VII, 25), »que vous avez engendré coéternel à vous-même, et créé au commencement de vos voies (Prov. VIII, 22), en qui le prince du monde n’a rien trouvé digne de mort (Jean, XIV, 30); Victime innocente, dont le sang a effacé l’arrêt de notre condamnation (Coloss. II, 14).
Voilà où ces livres sont muets. Ces pages profanes nous offrent-elles cet air de piété, ces larmes de pénitence, ce sacrifice que vous aimez des tribulations spirituelles d’un coeur contrit et humilié (Ps. L. 19) : et le salut de votre peuple, et la cité votre épouse ( Apoc. XXI, 2), et ce gage de l’Esprit-Saint ( II Cor. V, 5), ce calice de notre rançon?
On n’y entend point ces cantiques : « Mon âme ne sera-t-elle point soumise à Dieu? à Dieu dont elle attend son salut? Car il est mon Dieu, mon Sauveur, mon Tuteur, et je ne serai plus ébranlé (Ps. LXI, 2). » Personne n’y entend cet appel : « Venez à moi, vous tous qui êtes affligés. » Ils dédaignent, ces superbes, d’apprendre de lui qu’il est doux et humble de coeur. C’est là ce que vous avez caché aux sages, aux savants, et révélé aux humbles ( Matth. XI, 28, 29, 35).
Oui, autre chose est d’apercevoir du haut d’un roc sauvage la patrie de la paix, sans trouver le chemin qui y mène, et de s’épuiser en vains efforts, par des sentiers perdus, pour échapper aux embûches de ces fugitifs, déserteurs de Dieu , guerroyant contre l’homme sous la conduite de leur prince tout ensemble lion et dragon; autre chose, de suivre la véritable route, protégée par l’armée du souverain empereur, où n’osent marauder les transfuges de la milice céleste : car cette voie ils l’évitent comme un supplice. Et ma substance s’assimilait merveilleusement ces vérités : à la lecture du moindre de vos apôtres (I Cor. XV, 9), je considérais vos oeuvres, et j’admirais (Habac. III, 2). (428)
