25.
Un jour écoulé ne revient plus, hier est remplacé par aujourd'hui, à aujourd'hui succédera demain. Ainsi passe le temps et toutes les choses temporelles, jusqu'à ce que vienne l'accomplissement éternel de cette promesse : « Celui qui persévérera jusqu'à la fin sera sauvé1 ». Si le monde périt, pour qui donc l'épouse enfante-t-elle ? Si elle ne doit enfanter que par le coeur et non par la chair, pourquoi se marie-t-elle ? Mais si le monde doit encore durer, pourquoi ne pas aimer davantage Celui par qui le monde a été fait ? Si déjà les agréments du siècle s'évanouissent , le chrétien peut-il les rechercher avec tant d'ardeur? Alors même qu'ils devraient subsister encore, la sainteté suffirait pour nous les faire mépriser. Dans la première hypothèse, il ne reste aucune espérance à la passion; dans la seconde, la charité trouve une augmentation de gloire. Pendant combien d'années le corps conserve-t-il la fleur de sa beauté et de sa force ? Telles femmes pensent au mariage et y aspirent ardemment; ont-elles à subir pendant quelque temps des mépris ou des délais? vite elles ont vieilli, à tel point que la honte qu'elles éprouveraient de se marier à cet âge, étoufferait le plaisir qui rayonne pour elles autour du mariage. D'autres ont contracté mariage, mais peu de temps après leurs maris les ont quittées pour entreprendre quelque long voyage; en attendant leur retour, elles ont vieilli, condamnées à une sorte de veuvage prématuré. Que dis-je ? il ne leur a pas été donné, parfois, de revoir leurs époux même dans, la vieillesse. Ainsi, grâce aux mépris ou aux lenteurs de futurs époux et à l'absence des maris, on a pu enchaîner la concupiscence charnelle pour repousser le crime ou l'adultère ; pourquoi donc n'enchaînerait-on pas cette même concupiscence quand il s'agit d'éviter le sacrilège ? On l'a réprimée quand elle était dans toute son ardeur et qu'on ne la retenait que pour quelque temps, et on ne le pourrait quand elle est refroidie et qu'on lui a ôté tout espoir ? Est-ce que la passion n'est pas d'autant plus ardente qu'elle conserve plus d'espoir de se satisfaire ? En vouant à Dieu la chasteté perpétuelle on détruit cette espérance qui est comme le foyer de l'amour. Voulez-vous donc vous donner plus de facilité pour la réprimer? ne lui laissez plus aucun espoir capable de l'enflammer; mais pour cela le moyen le plus efficace, c'est la prière ; sans elle, le désir du mal n'en devient que plus ardent.
Mat. X, 22. ↩
