13.
Ceux qui soutiennent qu'une telle union n'est -pas un mariage mais un adultère, ne me paraissent pas avoir assez pesé leur affirmation; c'est la similitude qui les trompe. En effet dans le langage ordinaire, on dit de celles qui refusent de se marier pour se livrer à la perfection chrétienne, qu'elles deviennent les épouses de Jésus-Christ. Or; voici comment raisonnent nos contradicteurs : si une femme contracté un second mariage du vivant de son premier mari, elle est adultère, comme l'a déclaré le Sauveur lui-même1; donc, du vivant de Jésus-Christ, sur qui la mort n'a plus aucun empire2, celle qui renonce à son union avec lui pour épouser un homme, est véritablement adultère. Ce raisonnement, s'il a quelque chose de spécieux, est gros de conséquences absurdes. Il suit de là en effet que si une femme, du vivant de son mari et avec son consentement formel, fait voeu de continence, elle est coupable et fait de Jésus-Christ un adultère, puisqu'elle l'épouse avant la mort de son autre mari. D'un autre côté, il est certain qu'un second mariage paraît moins digne que le premier; or à quelle veuve est-il jamais venu la pensée de regarder Jésus-Christ comme un second époux? Même pendant leur premier mariage, alors quelles se montraient soumises et fidèles à leurs maris, ne pouvaient-elles point regarder Jésus-Christ comme leur époux, non point charnel, mais spirituel? L'Eglise, dont elles sont les membres, est appelée l'épouse de Jésus-Christ, et cette Eglise, par l'intégrité de sa foi, de son espérance, de sa charité, est réellement vierge, non-seulement dans les vierges, mais aussi dans les veuves et les épouses chrétiennes. C'est à l'Eglise tout entière, dont les fidèles sont les membres, que l'Apôtre a dit : « Je vous ai unie dans une chaste virginité à un seul époux, Jésus-Christ3 ». Cet époux qui a pu naître d'une vierge, sans qu'il y eût pour elle aucune corruption de la chair, ne peut-il pas donner à son épouse vierge une fécondité sans tache?
Ceux qui, sans assez y réfléchir, soutiennent que si des vierges renon cent à leur voeu, pour se marier, elles ne contractent pas un véritable mariage, devraient tirer cette affreuse conclusion que, n'étant pas épouses, elles doivent se séparer de leurs maris sous peine d'être adultères; puis, en voulant rétablir ces femmes dans leur ancienne continence, ils feront de leurs maris tout autant d'adultères, puisque du vivant de leurs femmes ils convolent à de nouvelles noces.
